Les années PALACE 1985 -1990

 

« Le Palace » par Michel Bricard

Souvenirs, souvenirs ! Souvenirs du « Gay Tea Danse » des dimanches en fin d’après-midi qui était une institution dans l’institution qu’était alors le Palace. Dans la période la plus faste, entre 1985 et1986, certains dimanches étaient fabuleux. Un bon millier de garçons étaient réunis, en jean-tee-shirts ou apprêtés à la dernière mode. Tous les styles se mélangeaient, avec une nette tendance au cuir bodybuildé et aux folles en liberté.  Un parfum d’eau de toilette, de cigarettes blondes et de poppers flottait depuis le parterre de ce qui était un ancien théâtre jusqu’aux hauteurs des balcons obscurs -et torrides. La musique était ce qu’il y avait de mieux alors, et l’ambiance sur la piste de danse allait croissant jusqu’à ce que tout/tous fusionnaient torse-nu, ruisselant de sueur, pour s’adonner à la célébration tribale de l’éblouissante magie du désir de garçons.

 

Quelle nostalgie que se rappeler ces moments !

Il y a la queue des garçons sur le trottoir de la rue du Faubourg Montmartre.

Il y a « Pétard » à l’entrée, le videur,
Il y a la musique qui saisit d’un coup, au bout du couloir de star,
Il y a le gin-tonic servi par Wadeck, le barman polonais au bar du 1er étage,
IL y a des mecs par centaines, c’est plein à craquer.
Il y a ceux qui matent,
Ceux qui se font mater,
Il y a ceux qui se connaissent, qui se bisottent et qui papotent,
Il y a ceux qu’ont de gros biscoteaux et un pois chiche dans la tête,
Il y a des petits cons d’allumeurs,
Il y a des folles à moustaches
Il y a des folles à moustaches et à éventail japonais,
Il y a des folles de banlieue,
Il y a des exhibitionnistes en string (des fois ils sont même à poil),
Il y des coiffeuses, des pétasses en grand appareil,
Une fois il y eu une femme déguisée en homme,
Il y a trois pommes et son motard,

Quelquefois, il y a eu un spectacle,
Il y a ceux qui  cherchent depuis si longtemps celui qui…enfin… l’homme de leur vie,
Il y a des acteurs de porno d’un film de Cadinot,
Il y a des stars incognito, des vrais, en lunettes noires,
Il y a Pacadis qui picole au fond d’un fauteuil -demain, il écrira dans Libération qu’il s’est éclaté au Palace,
Des fois, il y a des New-Wave, mais ça devient rare,
Il y a maintenant des petits Tintins, des kikis à houppette,
Il y a des regards, des bretelles, des coupes en brosse,
Des culs d’enfer, des muscles à gogo.
Sur la piste de danse, Il y a ceux qui sautent comme des kangourous,
Ceux qui vibrent bizarrement,
Ceux qui sont sérieux comme des papes,
Ceux qui bougent mal,
Ceux qui bousculent tout le monde,
Ceux qui se prennent pour des stars, mais qui n’en sont pas,

Ceux qui sautent sur la scène et se donnent en spectacle, poursuivis par un projecteur,
Et puis il y a les hauteurs sulfureuses et sombres,
Il y a ces odeurs de poppers, de fumée de blondes, d’alcool, d’eau de toilette, « Jules », « Vétiver », « Egoïste » ou « Anthéus »,
Il y a ces torses luisants de sueur.
Et il y a eu Jimmy Sommerville qui-a-marché-sur-le-pied-de-Vincent-et-qui-lui-a-dit-« excuse-me ».
Voilà pourquoi on y allait les dimanches après-midi !