Présentation débats

Débats, colloques et rencontres

Mémoire des Sexualités a organisé de nombreux débats.
–    De 1989 à 1994 : pendant la période du grand effondrement de la vie homosexuelle à Marseille, et au moment de sa redynamisation au début des années 1990
–    Les colloques et débats organisés depuis 1998 : Prides, Salon de l’homosocialité, Forum Euroméditerranéen, etc.

Les débats rappelés ici, le sont à partir de la transcription des interventions.
Ces transcriptions n’ont pas été validées par les auteurs.
Elles sont donc présentées sous la seule responsabilité de l’association.

1.    Les colloques et débats organisés à Marseille par l’association Mémoire des Sexualités de 1989 à 1994

Le contexte :

Une vie associative homosexuelle importante s’est développée à Marseille de 1978 à 1987, avec le Groupe de Libération Homosexuelle, devenu bientôt Groupe des Lesbiennes et Homosexuels et les cinq Universités d’Eté Homosexuelles dont il a été porteur de 1979 à 1987. La dépénalisation de l’homosexualité, l’apparition et le développement de l’épidémie du Sida, le développement d’une offre commerciale gay (revues, bars, boites, saunas) changent radicalement le contexte militant. En 1987, le GLH et l’UEH disparaissent. Mais la vie homosexuelle marseillaise n’est pas plus facile pour autant, les lieux de confrontations d’idées ou de projets disparaissent, et la visibilité homosexuelle disparaît complètement. Les anciens du GLH font bien encore quelque temps des dîners-débats, mais cela reste discret.

L’association Mémoire des Sexualités s’est crée à Marseille en 1989, elle regroupe des personnes qui sont homosexuelles et d’autres qui ne le sont pas. A l’heure où les homosexuels ont disparus du champ associatif, il est peut-être temps d’organiser ensemble un débat public qui banalise le fait homosexuel. C’est ainsi que des colloques et des débats sont organisés dans des lieux publics, avec des personnalités connues, en coordination avec des associations non communautaires (Ligue des Droits de l’Homme, Planning Familial, AIDES Provence ou encore Fédération des centres sociaux) ou re-émergeant dans le  champ communautaire (comme le collectif Gay et Lesbien Marseille Provence), apparaît aux homosexuels militants comme une respiration, un retour à une affirmation et une « visibilisation », nécessaire après qu’ils se soient tant battus pour conquérir leurs droits.

Les débats :

Le développement dramatique du Sida dans la décennie 1985-1995 explique l’importance de la place qui revient à cette pandémie au cours de ces débats, alterné avec d’autres thèmes concernant en particulier les jeunes, les femmes, et les homosexuels. C’est ainsi que se tiennent successivement :

•    Colloque « Morales, sexualités et histoire » en avril 1989
•    M. Dominique Charvet, Directeur de l’AFLS, sur « L’action de l’Agence Française de Lutte contre le SIDA » en janvier 1991
•    M. Jean-Pierre Michel, député de la Haute-Saône sur « La proposition de loi sur le Partenariat Civil »en mars 1991
•    Mme Françoise Héritier-Augé, présidente du Comité National du Sida, chargée de la Chaire d’Etude Comparée des Sociétés Africaines, sur le thème « Sexe biologique, sexe social. La construction sociale du genre » en juin 1991
•    Mme Nicole Savy, membre du bureau national de la Ligue des Droits de l’Homme, sur « Les droits des femmes » en janvier 1992
•    M. Daniel Defert, fondateur et ancien président de AIDES, sur le thème « Sida, engagement, solidarité » en janvier 1992
•    Mme Michèle Perrot, historienne, coauteur de livres sur « Histoire de la vie privée » et sur « l’Histoire des femmes », sur le thème « Pourquoi une Histoire des femmes ? » en février 1992
•    M. Adil Jazouli, sociologue, fondateur de Banlieuescopies, sur « Jeunes des banlieues, violences et désirs » en mars 1992
•    Colloque avec M. Adil Jazouli sur « Désirs, affectivités, sexualités des jeunes dans les cités » autour de trois thèmes: « Vie affective et logement », « Décalages garçons-filles » et « Sexualité, culture et prévention » en mars 1993
•    M. Bernard Sellier, malade du SIDA depuis 10 ans qui se qualifie lui-même de « survivant à long terme » sur « Vivre avec le SIDA » en février 1993
•    MM. Jean le Bitoux, co-auteur du livre sur Pierre Seel (« Moi Pierre Seel, déporté homosexuel ») et Emile Témime, historien marseillais, sur « La déportation des homosexuels » en avril 1994
–     Enfin dans le cadre d’une co-invitation avec la FNAC, nous avons fait intervenir M. Alfred Spira, co-auteur d’un Rapport sur  » Les comportements sexuels en France », sur le thème « La sexualité des français » en avril 1994. N’ayant pas pu en conserver l’enregistrement, nous présentons des extraits de son rapport.

Leur contenu :

Tous ces débats et colloques sont marqués par le contexte qui prévaut dans les années 90. Le sida est très prégnant, pour les homosexuels, mais aussi déjà bien au-delà de cette « communauté ». Les débats témoignent de sa place importante avec la mobilisation médicale, la mobilisation militante solidaire ou encore avec le témoignage d’une personne atteinte. La marche des beurs du début des années 80 donne lieu à une visibilité plus grande des jeunes des banlieues. Les femmes ont obtenu le droit à l’avortement dès les années 70, mais bien des luttes sont encore à conduire pour obtenir la pleine égalité des sexes. C’est aussi le moment de réfléchir sur le genre, sur la structuration des relations hommes-femmes, sur leur place spécifique dans l’histoire sociale, ou encore sur le droit des femmes. Enfin les futurs « combats » des homosexuels apparaissent déjà, la reconnaissance de la mémoire de la Déportation et la revendication du droit au couple.

Le colloque Morales et Sexualités, en 1989, donne à plusieurs personnalités – enseignants et praticiens – l’occasion d’inaugurer ce cycle de débats en approchant la sexualité à travers diverses disciplines, l’histoire, le droit, la sociologie, la santé ou la psychiatrie. Ce sont : Léon-Robert Ménager, Christian Bruschi, Jean-Pierre Poly, Annick Riani, Christian de Leusse, Bernard Paillard, Thierry Gamby, Denis Duprez, Alain Molla, M. Alessandri, Mme Bartholomeï, Béatrice Stamboul. On citera ici quelques éléments.
Christian Bruschi s’attarde en particulier sur la construction historique du rapport à la sexualité : « De façon générale, on assiste entre le IVème et le Vème siècle à l’apparition d’une nouvelle ligne de démarcation entre espace public et espace privé. Et on renvoie systématiquement ce qui est sexuel dans l’espace privé. Cela va durer pendant quinze ou seize siècles ; c’est à peine si aujourd’hui, et encore timidement on est en train d’en sortir. Le texte de Salvien là-dessus est très significatif mais de façon plus générale il y a la Constitution de 326 de Constantin sur l’adultère, où il revient sur la loi d’Auguste qui en faisait une infraction dont la poursuite était publique. »
Annick Riani s’est penché sur la prostitution au XIXème siècle : « La transformation de la vision globale d’un monde dans les mentalités collectives a autorisé l’intégration d’un désordre à un ordre non plus religieux mais idéologique, social et moral. … De la répression à la prévention, du criminel au délinquant, de la marginalité à la marginalisation, l’on est passé de la vision cosmique et religieuse d’un monde à une idéologie sociale. Une stratégie efficace de la récupération s’est dessinée. Le désordre serait-il la marge infime échappant à la récupération ? »
Bernard Paillard a analysé comment ont été vécues les différentes épidémies et comment la peur du Sida s’apparente aux peurs paniques vécues par nos sociétés dans le passé.
Mme Bartholomeï souligne les difficultés de la vie sexuelle en prison et Mme Stamboul note la difficile reconnaissance du droit des malades psychiatriques à une sexualité.
(Colloque Morales et Sexualités avril 1989)

A propos du sida, Dominique Charvet, directeur de l’AFLS, souligne en 1991 que « L’apparition du sida a fait naître des conduites d’inquiétude, de repli sur soi, d’exclusion, de désignation de bouc émissaire qui sont incompatibles avec une demande de solidarité, pourtant indispensable pour faire face lucidement et efficacement à l’épidémie. Pour lutter contre ces réactions qui privilégient les intérêts particuliers – fussent-il individuels ou de groupe – il faut créer une solidarité autour de la maladie et à cette fin engager une action. »
(Débat Dominique Charvet janvier 1991)

La possibilité d’obtenir un jour le droit au couple pour les homosexuels est défendue par Jean-Pierre Michel, dès 1991 :  » En France, le concubinage homosexuel n’est pas reconnu, il est même nié. Il I’a été notamment au printemps dernier, par deux arrêts de la Chambre sociale de la Cour de Cassation concernant la Sécurité Sociale. Ces arrêts sont réactionnaires, voire dramatiques. Selon l’un de ces arrêts, dans le cas d’une cohabitation d’homosexuels, I’un des deux ne peut pas bénéficier de la couverture sociale de l’autre. A l’étranger, un pays – le Danemark – a voté, il y a un an, un texte sur le partenariat civil. C’est un texte qui concerne spécifiquement les homosexuels, en reconnaissant un certain nombre de droits aux couples homosexuels. Dans le même sens, certaines juridictions nord-américaines se sont montrées moins réactionnaires que la juridiction française, puisque les Cours suprêmes de San Francisco et de New York ont reconnu ces couples dans certaines circonstances assez limitées. En France, on n’en est pas là, on n’en est qu’à une proposition de loi. »
(Débat Jean-Pierre Michel mars 1991)

Anthropologue, Mme Héritier s’efforce d’analyser les modalités de la construction sociale du genre, ainsi, elle note, en 1991, qu’en Nouvelle Guinée que :  » Dès sa septième année, dans la « maison » des hommes, l’enfant mâle va être « inséminé », de façon régulière, par fellation, tout d’abord par les maris des sœurs et des cousines parallèles patrilatérales de son père, ensuite par les jeunes adolescents non encore mariés. L’ordre de l’âge est impératif : les plus âgés inséminent les plus jeunes. On cherche à éviter autant que faire se peut tout investissement psychologique et affectif entre les partenaires de l’opération. Au moment du mariage, les jeunes hommes doivent passer exclusivement à l’hétérosexualité (sauf naturellement lorsqu’ils sont tenus d’accomplir leur devoir en inséminant leurs neveux par alliance, les fils des frères de leurs épouses). Pratiquement presque tous maîtriseraient ces changements sans éprouver de graves problèmes. »
(Débat Françoise Héritier juin 1991)

Concernant les droits des femmes, Nicole Savy note en 1992 : « Nous en sommes maintenant à ce troisième temps que j’appelle celui de la mixité. Celle-ci est née de la non mixité précédente. L’accès partiel des femmes au droit de vote, au droit de travailler et aux droits spécifiques a commencé à transformer l’image et l’usage que nous avons des droits en général, des droits de tous, de  » l’homme « , au sens d’  » être humain « . Nous sommes toujours dans une société patriarcale, le modèle masculin est encore le modèle dominant, le pouvoir – politique, par exemple – appartient encore aux hommes dans l’écrasante majorité des cas, mais ce modèle masculin, comme le modèle féminin, est en pleine reconstruction, et en grande difficulté. »
(Débat Nicole Savy  janvier 1992)

Daniel Defert explique en 1992, les raisons de la fondation de AIDES : « Il n’y avait pas en France un mouvement homosexuel puissant. Il y avait 40 associations d’homosexuels à Paris, mais avec en tout 43 militants : c’en était 38 de trop ! Il était donc inutile de créer une association homosexuelle de plus. Or, l’épidémie était considérée comme associant l’homosexualité et le virus. Il s’agissait pour nous de « débrancher » ces deux données, sans nier le fait qu’à l’époque les homosexuels semblaient les plus atteints. Mais ceux qui vivaient le plus mal leur homosexualité étaient ceux qui vivaient le plus mal la réalité de l’épidémie et sa menace qui pesait sur eux : ce sont ceux-là qui s’emmuraient le plus. On voit encore aujourd’hui des malades qui disent « mais ma famille va donc apprendre que… » alors que la famille est présente, qu’elle les soigne et qu’elle sait de quoi ils sont malades. Le problème de l’aveu, de la communication ne se pose même pas, et pourtant ils continuent à avoir ce phantasme et en même temps ce déplacement. (Je pense qu’ils « déplacent » ainsi le problème pour se protéger). »
(Débat Daniel Defert janvier 1992)

Michèle Perrot précise sa démarche d’historienne : « Je pense que, de ce fait, « L’Histoire des femmes » peut avoir des effets importants, car elle est productrice de questions et de savoirs différents. Les historiennes ont conquis une certaine légitimité, puisque dans l’ensemble l’accueil fait à notre travail est bon, et qu’on ne le considère pas comme un « ouvrage de dames », mais comme quelque chose de sérieux. J’espère qu’on comprendra que la méthodologie employée peut servir dans d’autres domaines. Quelles sont les conséquences de cette Histoire des femmes ? Nous espérons un vrai débat, ouvert et important, dans le champ de la recherche, et dans celui du public également. »
(Débat Michelle Perrot février 1992)

A propos des jeunes des banlieues, Adil Jazouli note en 1992 : « Dernière tendance générale observée, à confirmer : il se fait un silence mortel sur le problème des rapports sexuels entre filles et garçons. Notamment chez les jeunes filles d’origine maghrébine. Tout le monde sait que les jeunes des banlieues font l’amour. Mais personne ne dit comment. II faut donc chercher, interroger. Tout le monde dit que les filles sont vierges jusqu’à leur mariage. Vierges, mais comment ? On s’aperçoit que la sodomie est pratiquée de manière absolument générale, mais non dite. Les garçons estiment que ces filles sont des filles « bien », qu’elles ne sont pas des « salopes » : il n’y a pas dégradation de la fille dès lors qu’elle n’a pas eu de rapports sexuels « normaux » entre guillemets. Il y a donc là une hypocrisie monumentale qui s’installe. »
(Débat Adil Jazouli mars 1992)

Bernard Sellier, éprouvé de longue date par la maladie, apporte en 1993 un témoignage essentiel :  » Je me bats pour que cette maladie se banalise dans les esprits car nous avons chaque jour de nouveaux moyens de lutte mis à notre disposition. Je n’ai jamais voulu faire pleurer les chaumières mais faire reconnaître ma dignité d’homme libre. Je ne suis ni un taré parce que j’aime les hommes, mes semblables, ni un pestiféré parce que j’ai contaminé lors de rapports sexuels. Je revendique la responsabilité, la prise de conscience, l’âge adulte de la communauté homosexuelle qui a trop tendance à se présenter elle-même sous ses propres caricatures. Conséquence de la culpabilité judéo-chrétienne qui pèse de tout son poids dans notre comportement en nous marginalisant à nos propres yeux. Les intégrismes de tout poil me font frémir. »
(Débat Bernard Sellier février 1993)

Willy Rosenbaum se penche, en 1994, sur ses combats contre la maladie : « Si l’on situe ces treize années d’épidémie dans le cadre de l’histoire de la médecine, on s’aperçoit que jamais la médecine n’a progressé aussi vite. Nous avons une stratégie thérapeutique dont les concepts sont aujourd’hui bien établis. On connaît le virus, on sait qu’il détruit le système immunitaire. En réponse, on a élaboré une stratégie essentielle : la lutte contre les complications dues à la destruction de l’immunité. On a élaboré une sorte de météorologie : un système prédictif capable d’anticiper sur les risques de complications. Une fois les prévisions faites, intervient le système du parapluie, c’est à dire la capacité d’éviter que ces complications ne surviennent. »
(Débat Willy Rosenbaum mars 1994)

Avec l’aide de Adil Jazouli, un colloque a été organisé en 1993, il a permis à de nombreux travailleurs sociaux de s’exprimer. Parmi les propos tenus concernant les difficultés concernant les jeunes des deux sexes dans les banlieues, notons : « Perversion des relations garçons / filles, l’affectif mis de coté, seul compte l’acte sexuel (Z.M), Pas de sexualité à la maison, la sexualité se fait toujours ailleurs (locaux, caves) (F.B), Rapport de sodomie très important (J-E.G), Décalage énorme entre garçons et filles (A.D), Crise d’identité très forte chez les jeunes maghrébins: drogue, psychiatrisation, tentatives de suicide, prison, sida… On flirte avec la mort en permanence. Période de blocage des relations. La revendication d’autonomie des filles est perçue comme une trahison d’une histoire commune (A.J), Les toxicomanes sont très isolés (A.J), Les jeunes expriment qu’ils ne peuvent pas s’en sortir tout seuls (A.J), Violence des rapports humains, affectifs et sexuels (A.D), Sexualité souvent de recours : fantasme, homosexualité, prostitution (J-E.G), L’alcool, la drogue sont des dérivatifs de l’homosexualité, même assumée (Z.M). »
(Colloque Désirs, affectivités, sexualités dans les cités mai 1993)
Sur la déportation des homosexuels, Jean le Bitoux note en 1994,  » En faisant des recherches, j’ai découvert d’autres témoignages. Comme celui d’un Alsacien  de  Colmar qui  a été raflé  peu après Pierre Seel, et torturé dans les locaux de la Gestapo aux fins de compléter les fichiers d’homosexuels. Mais il a été expulsé (vers la zone française, notamment Belfort) parce qu’il a nié son homosexualité, et qu’il n’y avait pas de preuve. Ou celui d’un grand résistant alsacien, Aimé Spitz qui a été arrêté lors de sa trente-quatrième ou trente-cinquième mission de résistance en Alsace et qui, au début de la guerre, a eu à comptabiliser toutes les populations expulsées d’Alsace, parmi lesquels les expulsés pour homosexualité, dont il a dressé une liste, entre juillet et décembre 1940. »
(Débat  Jean le Bitoux Emile Temime avril 1994)

M. Alfred Spira, co-auteur d’un Rapport sur  » Les comportements sexuels en France », sur le thème « La sexualité des français » en avril 1994. Les premières analyses permettent d’apporter des éléments utiles à la prévention en identifiant les canaux de communication sur la sexualité, les normes qu’il convient de valoriser et le type d’information qu’il faut privilégier. L’analyse conduite de manière différentielle selon les caractéristiques d’activité sexuelle et socio-démographiques doit contribuer à élaborer des stratégies de prévention spécifiques pour différents groupes de la population, en prenant bien évidemment en compte les aspects collectifs, en particulier culturels et politiques, de la prévention.
(Extraits du Rapport paru en 1992)

Ces débats ont été très riches, ils sont d’une époque où il était beaucoup plus facile de faire venir ces différentes personnalités à Marseille et où très peu de débats s’organisaient sur ces thématiques. Il a paru essentiel de leur redonner vie afin de faciliter les recherches historiques.
Un remerciement particulier doit être adressé à Anne Guérin pour avoir procédé à la transcription de l’essentiel de ces débats.

2.    Les colloques et débats organisés à Marseille par l’association Mémoire des Sexualités depuis 1998

Pride de juin 1998

Colloque sur « Peut-on étudier des cultures gaies et lesbiennes aujourd’hui ? »11-12 juin 1998
Ces rencontres s’inscrivent dans le prolongement du colloque organisé par Didier Eribon au Centre Georges Pompidou de Beaubourg sur les « gay et Lesbian studies », lors de l’Europride en Juin 1997. Il y a invité des intellectuels américains, canadiens ou australiens (Léo Bersani, Nicole Brossard, George Chauncey ou encore Monique Wittig) et de jeunes chercheurs français, dont les interventions dans les actes de ce colloque « Les études gay et lesbiennes » parus en avril 1998 (édité par le Centre G. Pompidou). Et le livre « Les gays savoirs » paru lui aussi en avril 1998 (édité sous la direction de Patrick Mauriès et le Centre G. Pompidou) témoigne de ce renouveau.
(Colloque 11-12 juin 1998)
(Extrait du livre de Léo Bersani)

Pride de juin 2000

– Mercredi 28 juin 2000, Geneviève Pastre autour du livre « Homosexualités,  expression/répression » ouvrage collectif sous la direction de Louis-Georges Tin et Geneviève Pastre (Co-édité Ed.G.Pastre-Stock)
L’expression culturelle et politique de l’homosexualité signifie-t-il la fin de la répression des homosexuels ? La vivacité des discussions autour de l’homosexualité prouve que le débat est toujours aussi passionnant.
La première partie du livre remet en perspective les modalités d’expression et de répression de l’homosexualité dans l’Antiquité et à l’époque moderne. La seconde partie aborde les différentes expressions représentatives de l’homosexualité: la dépénalisation (à travers le cas de l’Angleterre des années 1960), la conjugalité (avec la question du PACS), l’homophobie (dans le cadre des discours juridiques), la question du « outing » ou encore les recherches en sciences sociales.
Le livre fait enfin des propositions concrètes dans les champs politique, philosophique et littéraire. Les 15 auteurs des contributions sont historiens, juristes, spécialistes en études bibliques, linguistes, sociologues…  Geneviève Pastre, écrivain-e, dirige les Editions G.Pastre.
– Jeudi 29 juin 2000, Jacques Fortin  autour de son livre « Homosexualités, l’adieu aux normes » Editions Textuel (le Seuil) Collection la Discorde, mars 2000. Adieu à la tyrannie de la norme hétérosexuelle dominante… et adieu aussi à l’antinorme despotique d’une homosexualité à son tour normative. Ni dissolution dans l’indifférence, ni enfermement volontaire dans la célébration d’une différence !
Contre les séparations normatives des idéologies de la différence et contre la ghéttoïsation des libertés, Jacques Fortin dessine un horizon où la catégorie d’homosexualité serait appelée à dépérir dans la diversité et la banalité des pratiques sexuelles. Avec cette position originale et radicale, Jacques Fortin apporte des arguments neufs au débat public: pour l’accès à la parentalité ou pour le vote de la loi contre l’homophobie. Jacques Fortin est président de l’Université d’été homosexuelle de Marseille.

Pride de juin 2002

Homophobie, homoparentalités, sexisme, lesbophobie, nouvelles solidarités ? Les nouvelles revendications des gays et des lesbiennes
Débat inter-associatif du samedi 22 juin 2002 au Chocolat Théâtre Cours Julien, Marseille, avec la participation de Gérard Bach-Ignasse directeur du DESS Genres et Sexualités (Université de Reims) co-initiateur du PACS vient de publier une enquête sur « Les pacsé-e-s » et les suites du Pacs  (l’Harmattan)
Présentation :
Quelques années après l’adoption du PACS, après les grandes offensives de l’extrême droite, au seuil d’une nouvelle législature quelles sont les revendications de homosexuels, des lesbiennes, des bisexuels et des transgenres ?
1- A l’intérieur de la « communauté » homosexuelle les intolérances restent nombreuses :
–    entre homosexuels, entre lesbiennes des intolérances existent, elles sont de divers ordres,
•    à l’égard des lesbiennes, les intolérances restent nombreuses, elles ne sont pas écoutées et prises aux sérieux par les gays,
•    à l’égard des bisexuels, à l’égard des transsexuels, etc.
Certains privilégient leurs désirs pour des jeunes, beaux et bien portants, d’autres évoquent une « communauté » mythique mais définissent soigneusement ceux qui sont acceptables et ceux qui ne le sont pas. Certains donnent priorité aux commerces « gays », d’autres au militantisme bénévole. D’autres refusent de se battre pour les homosexuels sans se battre aussi pour les droits des autres minorités. Certains considèrent que les droits des homosexuels sont intimement liés aux droits des femmes.
Nos diversités sont grandes.
Travailler ensemble dans nos diversités, est-ce possible ? est-ce souhaitable ? à quelles conditions ?
Le refus de ces diversités ne nuit-il pas à la conquête de nos droits ? à notre reconnaissance par cette société hétérosexiste et machiste ?
2- Dans l’ensemble de la société, les intolérances à l’égard des homosexuels sont diverses. Elles se sont exprimées au moment du débat sur le PACS, ou par la suite lors des débats sur l’homoparentalité.
Elles se manifestent tous les jours dans l’homophobie et l’intolérance à l’égard des choix de vie différents.
L’éducation nationale (l’école, le collège et le lycée), les églises, les familles, les lieux de travail, l’hôpital, la prison, mais aussi les lieux de détentes, la plupart des lieux de la vie sociale, ce sont autant de lieux où les homosexuels, les lesbiennes, les transsexuels plus encore, doivent faire attention à leurs comportements.
La jeune fille et le jeune garçon sont particulièrement sensibles à ces regards, à ce persiflage, à l’injure et à l’insulte.
Un parcours important a été fait, mais un chemin considérable reste à faire, pour que partout les homosexuels soient libre, les lesbiennes soient à leur aise,  et les transsexuel-les soient accepté-es.
Chaque association présente l’état de ses réflexions et souligne les revendications qu’elle juge prioritaires. La confrontation de ces choix permettra de construire les revendications communes à toutes nos associations.

3. Les Salons de l’homosocialité

De nombreux débats ont été organisés lors des Salons de l’homosocialité
Salon de l’homosocialité 2002
Salon de l’homosocialité 2003
Salon de l’homosocialité 2005
Salon de l’homosocialité 2006
Salon de l’homosocialité 2007

4. Forum Euroméditerranéen juillet 2013

Mémoire des sexualités a proposé deux débats dans le cadre du Forum euroméditerranéen organisé par le collectif IDEM.
Ces deux débats sont intimement liés à deux de nos domaines d’intervention privilégiés : la mémoire documentaire et la déportation homosexuelle. Ils se sont tenus les 16 et 17 juillet 2013.
Pour ces deux débats, nous avons eu la chance de rassembler certaines des meilleures compétences sur ces sujets, grâce au soutien logistique apporté par les Archives départementales des Bouches du Rhône et par le Collectif IDEM qui rassemble plusieurs des associations LGBT les plus actives à Marseille.

5. Débat janvier 2014 : Les homosexuels et les trans dans le music-hall

Hélène Hazera, journaliste à France Culture, 18 Janvier 2014
Présentation :
Impossible d’écrire l’histoire du café concert et du Music Hall en France sans que Marseille y ait une place d’importance. Non seulement le Marseille de la Belle Epoque est la capitale d’un genre quasiment éteint, la grande pantomime, non seulement Marseille et  sa région  ont ses artistes propres, qu’ils montent à Paris ou non, comme Scotto le plus fécond compositeur de chanson de la première partie du 20ème siècle. Mais, dans les autobiographies d’artistes, le passage – ô combien redouté –  à  l’Alcazar de Marseille, est une date importante. Dans ses mémoires Maurice Chevalier explique que Marseille c’est l’accès aux salles de toute la province.
Le caf’conc’, le music-hall sont des espaces où ce qui n’est pas possible ailleurs est possible. Le Toulonnais Mayol, au début du siècle impose avec son formidable talent  son efféminement et ses petits cris. Suzy Solidor campe un personnage ouvertement lesbien… Et Coccinelle passera à l’Alcazar.
La vitalité et l’exubérance des chansons de music-hall ont marqué la culture populaire de l’entre-deux guerres, les homosexuel-l-es et les trans (travestis, transsexuels, transgenres) y ont occupé une place de choix à une époque où l’homosexualité n’était pas trop stigmatisée en tant que telle, en particulier dans les métiers du spectacle.
Cette dimension est méconnue. Elle mérite d’émerger de l’anonymat et de la discrétion car elle a apporté indéniablement une dimension particulière au music-hall, et l’a enrichi de façon significative.
Des noms illustres marquent cette dimension méconnue,  Mayol  bien sûr  mais aussi Réda Caire (cet égyptien né Youssef Gandhour a été une idole de Marseille la Macho), Charles Trenet,  Jean Tranchant, Jean Sablon,  sans oublier les grandes lesbiennes de la chanson, Damia, Dany Dauberson, Nicole Louvier, ou – pour citer une Marseillaise – la Palma et ses cheveux gominés.
Nous donnons la parole à une grande amoureuse de la chanson, (et de la chanson marseillaise)  Hélène Hazera, qui produit sur France Culture l’émission « chanson Boum » dévolue à la chanson francophone.
Nous invitons aussi de grands spécialistes de la chanson, marseillaise en particulier, qui nous ferons le plaisir d’être présents dans la salle.
(Ecoute de l’intervention d’Hélène Hazéra)