années 80 : 1981- 1982

1981 : Variétés : Boys Town Gang (Cruisin the Streets), Prince (Controveisy). C’est le temps des boites gaies : le Transfert, le Palace

 1981 : ouverture du 1er lieu associatif gay de Lyon, avec l’aide de l’AFLS : ARIS

1981 : parution de plusieurs livres importants, celui de Jacques Girard « Le Mouvement homosexuel en France », 1945-1980 » ; le livre « Les Hommes au triangle rose » de Hans Heger, (éd. Persona) ; l’autobiographie de Yves Navarre Biographie où il raconte qu’il a découvert après la mort de son père que celui-ci avait projeté de la faire lobotomiser ; le livre de Marie-Jo Bonnet Un choix sans équivoque sur les relations amoureuses entre femmes ; le livre de Gilles Barbedette et Michel Carassou sur Paris Gay 1925

1981 : parution de L’Ami de passage de l’écrivain britannique Christopher Isherwood qui a vécu à Berlin la liberté sexuelle de l’Allemagne de Weimar (racontée dans Mr Norris et Goob bye to Berlin), il a quitté  l’Allemagne nazie en 1933, et vécu dans de nombreux pays avec de multiples amitiés, en Grèce, en Chine – qu’il a décrite envahie par le Japon en 1938 lors d’un voyage avec W.H. Auden – et dans d’autres pays ; membre  de l’American Friends Service Committee pendant la guerre, il est devenu citoyen américain en 1946

1981 : parution à Lille du n°2 de Novembre bulletin de liaison de Paroles lesbiennes féministes (crée en novembre 1979) ; parution du texte Attention à la marche des Lesbiennes résistantes au pouvoir hétéropatriarcal, contre le CUARH et son cadre légaliste et de masse et une reconnaissance d’une « orientation sexuelle » et contre l’hétéroréformisme qui est une collaboration de classe, tract signé des Lesbianaires, un collectif du Front lesbien et « parce que nous pensons que le lesbianisme politique est la seule lutte contre le système hétéropatriarcal, nous refusons de participer à cette manif et appelons à une réunion le 5 avril rue de Vaugirard »

1981 : création du collectif CQFD (lesbiennes radicales de l’ex-question féministe) pour le combat autour de la propriété du titre Questions féministes ; création du Centre Simone de Beauvoir, centre de production et d’archivage de productions vidéo réalisées par des femmes concernant des femmes, les 3 fondatrices sont Iona Wieder, Carole Roussopoulos et Delphine Seyrig ; ouverture de la 2ème Maison des Femmes, cité Prost à Paris XIème, lieu non mixte, féministe et lesbien ; constitution du Groupe des lesbiennes créatives et organisation d’une rencontre sur la création lesbienne ; création du MIEL (Mouvement d’information et d’expression des lesbiennes) à la Maison des Femmes, partie prenante du Mouvement féministe et des luttes homosexuelles mixtes

1981 : Nadia perd la garde de ses enfants parce qu’elle vit avec une femme depuis son divorce

1981 : en Belgique, Eliane Morissens, enseignante, est suspendue sans solde, après avoir évoqué son homosexualité à la télévision ; l’affaire sera largement médiatisée dans le journal du CUARH, Homophonies (n°18 d’avril 1982)

1981 : aux USA, à Atlanta il est fait état de 5 cas de malades mal identifiés à Los Angeles et 26 cas à New York, ainsi 30 cas sont signalés ; ces signalements font rapidement écho en France où Willy Rosenbaum rencontre un cas concernant un homosexuel qui a séjourné aux USA

1981 : aux USA, Larry Kramer, 47 ans, scénariste et romancier, organise dans son appartement de la 5ème Avenue, une réunion de gays pour comprendre le sarcome de kaposi à laquelle participent 5 ou 6 personnes, dont Edmund White, autour du Dr Fredman-Kien, ils lancent le GMHC (Gay Men’s Health Crisis) – dont White est le 1er président – pour mobiliser les gay face à la crise ; le Dr Fredman-Kien conseille de renoncer complètement au sexe ; Susan Sontag parlera de la seule période de liberté sexuelle dans l’histoire humaine entre 1960 (avec la contraception) et 1981 (avec le sida) ; pour White : « De même que le krash de 1929 avait clos les années folles, l’épidémie du Sida de 1981 a mis un terme aux sexy seventies »… « En 1981, tout cela a brusquement pris fin. Les gays de ma génération étaient particulièrement mal préparés à accepter la nouvelle réalité, dans la mesure où pour nous, la libération gay signifiait libération sexuelle, et la culture gay, la disponibilité et l’abondance sexuelle »… « Le sida nous a donné à tous un sujet et une gravité que notre œuvre n’avait jamais eu auparavant » ; Larry Kramer a écrit Faggots en 1978, il y dévoilait ses principes moraux face à la surconsommation sexuelle des gays, avant le sida, mettant le doigt sur un sujet que très peu de gays osaient aborder, et certain le considèreront pour cela comme un prophète (ainsi Gabriel Rotello dans son livre We Must Love One another Or Die. The life and Legacies Of Larry Kramer, 1999) ; il créera Act Up en 1987

1981 : aux USA, une journaliste, Susan Chira, témoignera de la difficulté pour les femmes de se faire une place dans la presse : « Beaucoup de journalistes femmes talentueuses et dont les ambitions avaient été contrecarrées (sont) amères, en colère. Vous n’imaginez pas combien la route a été longue. »

1981 : aux USA, sortie du film de Bob Rafelson Le facteur sonne toujours deux fois dans lequel Jack Nicholson renverse Jessica Lange sur la table de la cuisine de façon très osée alors

1981 : aux USA, la championne de tennis Billie Jean King , 38 ans, 39 titres du Grand Chelem dont 12 en simple, est forcée de révéler son homosexualité, elle perd tous ses sponsors et devient aussi la 1ère égérie de la cause homosexuelle

1981 : aux USA, le Chelsea Hotel est classé au patrimoine culturel de la ville de New York, il est depuis 1969 un lieu d’accueil des artistes et des écrivains, sous la houlette de Stanley Bard, ainsi le fréquentent Charles Bukowski, William Burroughs, Gore Vidal, Tennessee Williams, Allen Ginsberg, Andy Warhol, Edie Sedgwick, Robert Mapplethorpe, etc. dans des nuits folles, des beuveries et expériences de toutes sortes ; en 2007 les actionnaires majoritaires mettront fin à cette période magique

1981 : en Belgique, Luc Legrand, docteur en philosophie et en lettres en 1973, ancien d’Arcadie (1969-1970), membre du Centre Culture et Loisirs, et d’Antenne Rose, devient rédacteur de Tels Quels magazine, il sera président du Comité national homosexuel (actif lors du procès Macho), secrétaire de la fédération des Groupes homosexuels francophones, animateur du Triangle rose au poing (groupe socialiste), vice-président du Palais des Beau-Arts de Bruxelles

1981 : en Norvège, nomination de la 1ère femme chef du gouvernement, Gro Harlem Brundtland a 41 ans, elle dirigera le gouvernement à 3 reprises

1981 : création du MIEL (mouvement d’information et d’expression des lesbiennes) qui durera pendant 14 ans, jusqu’en 1995

1981 : création de l’AMEFAT l’association dédiée aux tanssexuels

1981 : parution du n°1 du journal Le Petit Gredin, journal publié par le GRED (groupe de recherche pour une enfance différente) issu – ainsi que le CHEN (commission homosexuelle de l’Education nationale) et le CUARH (comité d’urgence anti-répression homosexuelle) – de l’UEH de Marseille en 1979, il proclame joyeusement « ça y est , la pédophilie est de sortie ! »

1981 : la Cour européenne juge que la répression de l’homosexualité entre adultes consentants est contraire à la Convention européenne des droits de l’Homme, en se fondant sur les articles 8 et 14

1981 : les lieux commerciaux gay se développent à Paris, ainsi, le Trap, rue Jacob, l’espace est étroit, odorant (sueur, sexe, fumée, effluves), avec comptoir de bar à l’accueil et grande pièce noire (backroom) à l’étage

Janvier 1981 : la mairie de Paris commande 400 sanisettes Decaux : c’est la fin des « tasses » (les anciennes vespasiennes)

Janvier 1981 : le Parlement européen vote la convention de Strasbourg qui interdit le fichage en ce qui concerne la vie sexuelle

22 janvier 1981 : Marguerite Yourcenar, dans son discours de réception à l’Académie française, déclare : « On ne peut donc prétendre que dans cette société française et imprégnée d’influences féminines, l’Académie  ait été particulièrement misogyne ; elle s’est simplement conformée aux usages qui volontiers plaçaient la femme sur un piédestal, mais ne permettaient pas encore de lui avancer officiellement un fauteuil. Je n’ai donc pas lieu de m’enorgueillir de l’honneur si grand certes, mais quasi fortuit et de ma part quasi involontaire qui m’est fait ; je n’en ai d’ailleurs que lus de raisons de remercier ceux qui m’ont tendu la main pour franchir un seuil. »

24 janvier 1981 : la Collective Valérie Solanas diffuse le texte Quelques réflexions d’une collective contre le viol et les violences, appel à la résistance offensive, signé Scum-ent votre

Février 1981 : le journal du CUARH, Homophonies, consacre des articles à la pédophilie, le GRED développe l’idée du consentement des enfants, dont la sexualité est étouffée par la famille ; dans le n° 49 d’Homophonies, en novembre 1984, des lesbiennes participeront à ce débat à travers l’idée de la koréphilie, équivalent lesbien de la pédophilie

19 février 1981 : mort par suicide de Pierre Hahn (1936-1981), militant (à Arcadie, puis au FHAR) passionné par l’histoire de l’homosexualité ; il écrivait sous le nom de André Clair dans la revue Arcadie, il a écrit en 1979 Nos ancêtres les pervers La vie des homosexuels sous le Second Empire, Jean Le Bitoux sera très alarmé de voir Pierre Hahn disparaître avec toutes ses affaires dispersées et mises à la rue, et Guy Hocquenghem dans Gai Pied parlera en mai 1981 de sa « bibliothèque, caverne d’Ali Baba pour ceux qu’intéresse l’histoire de l’homosexualité… Ne serait-il pas possible au Gai Pied de lancer une souscription, et de la racheter pour la rendre accessible ? »  (c’est la période où Hocquenghem de son côté espérait enseigner l’histoire de l’homosexualité à l’Université mais il lui est opposé un refus) ; son suicide fait forte impression, il a été un acteur majeur de la naissance du FHAR, il est un témoin du passage entre Arcadie et les nouveaux mouvements homosexuels, il a rassemblé une documentation très importante qui est mise à la rue ; son livre sur le contrôle médical et policier Nos ancêtres les pervers paraîtra de façon posthume ; en 1973 il a parlé sans retenue des débuts de sa vie sexuelle à 13 ans, de ses aventures de drague dans les rues de Paris, où il court journellement le risque de se faire pincer par la police, de son rejet de ses parents, ainsi que de leur morale bourgeoise, et de sa passion pour les Arabes ; à l’âge de 20 ans poussé par son père il est entré dans un hôpital psychiatrique pour se faire guérir de son homosexualité, expérience qui lui laissera toute sa vie une haine de la profession médicale et de son homophobie ; Alain Leroi écrit sa nécrologie dans Homophonies en mai 1981

27 février 1981 : une manifestation est organisée par le CUARH (comité d’urgence anti-répression homosexuelle) à Paris avec le slogan « Ils ont tué Philippe ! Racistes anti-homo assassins !« , après qu’une agression à l’arme blanche se soit déroulée au jardin des Tuileries, Philippe est mort poignardé, la marche silencieuse vers la rue Sainte-Anne est suivie du dépôt d’une gerbe

Mars 1981 : parution du n°1 de Nouvelles questions fém inistes édité par Du Mouvement de libération des femmes, fondatrices Simone de Beauvoir, Christine Delphy, Claude Hennequin, Emmanuelle de Lesseps, revue internationale francophone, avec pour directrice Christine Delphy (la continuité du titre avec la revue Questions féministes qui paraît depuis 1978 est vivement contesté et se trouve porté sur le plan judiciaire)

13 mars 1981 : mort du dramaturge britannique Robin Cecil Romer Maugham (1916-1981), issu de Eton, il s’est couvert de gloire à 25 ans dans une bataille du désert en 1941, il est grièvement blessé en 1941, rentre en Angleterre et publie ses récits de guerre en Afrique du Nord (Come to Dust et Nomaad), acquiert la célébrité avec sa nouvelle The Servant qui fait scandale, son père magistrat tente de faire saisir le livre, mais Sommerset Maugham (1874-1965), alors au fait de sa gloire, soutient son neveu, Robin tire une pièce de cette histoire et Dirck Bogarde séduit par ce rôle tourne dans le film de Joseph Losey, The Servant est un énorme succès en 1963 ; directeur de la revue Gay Times, Robin Maugham est le premier auteur de sa génération à affirmer ses goûts, toute son oeuvre est inspirée par l’homosexualité, et The last Encounter en 1971 raconte les amours du général Gordon avec de jeunes garçons devant les remparts de Khartoum

19 mars 1981 : à Lille, création du CLARH (comité lillois anti-répression homosexuel), à la suite de la dissolution du GLH, laquelle qui a donné lieu à la création d’une autre association le GHEM (groupement homosexuel pour l’expression des minorités) ; l’objet de GHEM est la création de moment de visibilités et de sociabilités homosexuelles, il organise à partir de 1982 des soirées au Caméleon, à Wazemmes, et bientôt dans une salle municipale de Lille, en sous-sol de l’Hôtel de Ville ; le CLARH a le souci de mobiliser autant les lesbiennes que les gays, il s’installe dans la maison de la nature et de l’environnement dabns le quartier des Moulins, il ouvre le Gai Tapant en mars 1983 et héberge des bureaux pour les associations et collectifs qui en font la demande, avec un bar en autogestion, l’association Du côté des femmes semble prendre ses distances lorsque des films pornographiques y sont présentés, et le Gai Tapant ferme ses portes en 1984, l’un des membres les plus actifs tente de faire pérdurer l’esprit en ouvrant un bar place Catinat, mais le décès du propriétaire, mort du sida en 1984, mettra fin à l’expérimentation

2ème trimestre 1981 : Claude Courouve rédige l’article « homosexualité » de l’Encyclopedia Universalis ; il publie fragments 4, avec R. Kozerawski, recueil  alphabétique des auteurs ayant écrit sur l’homosexualité de 1478 à 1881, qui s’ajoute aux précédents ( fragments 2 et 3) concernant des citations d’auteurs, à un annuaire des associations, publications et chronologie de l’homosexualité d’avril 1981 et à plusieurs ouvrages sur L’affaire Lenoir-Diot de 1750, Les Gens de la Manchette (archives de la police parisienne de 1691 à 1748) et Contre-nature ? (étude sur l’incrimination pénale de l’homosexualité 1978-1980) ; Claude Courouve annonce la parution de 4 nouveaux ouvrages bibliographiques concernant les périodes 1882-1923, 1924-1951, 1952-1974 et 1975-1981, ainsi que 3 ouvrages : La police des mauvaises mœurs de la Révolution à nos jours, Des mots avant homo étude linguistique et L’homosexualité en Russie et en URSS

Avril-mai 1981 : les éditions Persona entrent avec succès sur la marché du livre avec Les Hommes au triangle rose le 30 avril et Le Livre blanc de Jean Cocteau le 14 mai ; Fanck Arnal journaliste à Gai Pied a découvert le premier livre lors d’un voyage en Allemagne au printemps 1979, son compagnon Alain Chouchan en a effectué la traduction, Jean-Pierre Joecker fondateur des éditions a demandé à Guy Hocquenghem de rédiger la préface ; Bernard-Henry Lévy attaque l’ouvrage l’accusant de nier le génocide juif ; pour le deuxième c’est Milorad, grand ami de Cocteau qui convainc Edouard Dermit d’en accepter la publication ; deux autres livres seront publiés en 1981 la traduction de Bent de Martin Sherman et la traduction du 3ème roman de Gore Vidal, Un garçon près de la rivière ; le pari fou des éditions Persona est gagné, elles s’installent dans l’espace thé/restaurant de la librairie Les mots à la bouche au 35 rue Simart dans le XVIIIème arr., Jean-Pierre Joecker et Jean-Marie Gombettes sont embauchés, ils se consacrent à plein temps à la maison d’édition et à la revue Masques ; 28 ouvrages seront publiés de 1981 à 1985 mais la priorité donnée à l’intérêt des ouvrages sur leur rentabilité financière ne sera pas toujours profitable…

Avril 1981 : à Marseille, le GLH ouvre son nouveau local (après la rue de La Palud) avec La Boulangerie Gay (48 rue de Bruys, près de la Plaine) ; les activités sont multiples, la préparation des UEH 1981, 83 et 85 en particulier, ou encore les émissions hebdomadaires de radio « Dérive nocturne » (sur Radio Soleil, avec un téléphone d’appel 91 46 70 30) animées par Mélanie Badaire (Jean-Michel Rousseau), Michel Richardot, Jean-Luc Vanhaesebrouck, Bernard Pollet et Michel Shmidt (ces émissions se prolongeront au-delà de la fermeture du GLH, en 1988-1989) ; les militantes lesbiennes féministes qui ont intégré le GLH seront bientôt mal à l’aise « les hommes gays prenaient tout le temps la parole et de nous écoutaient pas. On a donc réclamé des espaces non mixtes » dira Patricia Guillaume « ils nous ont proposé un seul créneau, le jeudi soir, en se gardant le week-end »

4 avril 1981 : 1ère marche nationale pour les droits et les libertés des homosexuels et des lesbiennes entre la place Maubert départ à 15 h et le Centre Pompidou, deux heures plus tard, la manifestation organisée par le CUARH, rassemble 10 000 personnes, dont de nombreuses féministes, manifestent à Paris ; 20 000 affiches ont été placardées dans la plupart des villes, 20 000 dépliants ont été mis à disposition dans les lieux commerciaux homos, 100 000 tracts ont été  distribués dans les gares, pour l’abolition de l’article 331 al.3, l’extension à l’orientation sexuelle de la loi contre le racisme et pour la dissolution des groupes de contrôle des homosexuels de la préfecture de police ; 150 000 francs ont été investis dans l’opération, un appel financier a été lancé auprès des propriétaires de bars et de boites gais, mais sans succès ; à Beaubourg, Jean BoyerCavailhès du GLH de Dijon, déclare « Nous vivons une journée historique, vous pourrez dire : j’y étais » ; la LCR  à l’instigation de Jean Boyer, de la CNH, a appelé à cette mobilisation ;  les « Chrétiens homosexuels » de David et Jonathan, association fondée en 1972, ont aussi leur banderole ; pour les soutenir, Jack Lang est en tête du cortège, entouré de Jean-Paul Aron et Yves Navarre (une photo montre Jean Le Bitoux au côté d’Yves Navarre qui vient d’obtenir quelques mois plus tôt le prix Goncourt pour Le Jardin d’acclimatation – la lobotomie subie par un jeune homosexuel -, avec en arrière plan la banderole « Vivre seulement vivre ») ; tous les candidats de gauche (François Mitterrand, Huguette Bouchardeau, Michel Crépeau, Alain Krivine) sauf Arlette Laguiller, soutiennent la dépénalisation ; Fabrice Eamer patron du Palace participe à la Marche ; les slogans : Attention à la marche, Notre préférence fera la différence, Non aux discriminations anti-homosexuelles ; le soir gala à la Mutualité avec en invitée d’honneur, Juliette Gréco, Pour les droits et libertés des homosexuels et lesbiennes, elle marquera bien des mémoires, « Nous avons du nous asseoir sur la scène, dira Richard Boitel-Stein, tant la salle était comble. Juliette Gréco sculpturale, nous enrobait de sa gestualité exquise. Ses interprétations nous tenaient suspendus. » ; l’impact de cette journée est considérable ; des lesbiennes du collectif du front lesbien des Lesbianaires refusent de participer à la marche, hostiles à la mixité et résistantes au pouvoir hétéro-patriarcal, elles distribuent le tract Attention à la marche et protestent contre le CUARH et son cadre légaliste et de masse, et contre l’hétéro-féminisme considéré comme une collaboration de classe ; le Quotidien de Paris parle des clones sortis du ghetto et disserte sur « un état psychique défaillant » ; à Marseille Le Méridional-la-France parle de « fête de la pédale triomphante » et de « grande manifestation exhibitionniste »; Homophonies écrit : « Le 4 avril nous a donné conscience de notre force et de notre nombre : un rapport de force existe maintenant. Comment l’exploiter ? »

8-14 avril 1981 : à Aix-en-Provence, la Mouvance folle lesbienne – dont les statuts ne seront déposés que le 5 septembre 1981- organise un festival de films homosexuels « Visages d’homosexualités » au cinéma l’Alambic : Une armée d’amour de Rosa Von Prauheim (1979), Word is out de Peter Aidair sur le mouvement politique homosexuel aux USA (1977), A bigger Splash de Jack Hazan (1973), Des prisons et des hommes (documentaire canadien 1971)

18-20 avril 1981 : à Poitiers, rencontres d’Exoudun organisée par Elles-Mêmes, lieu de rencontre de lesbiennes féministes, pour « mettre en commun toutes nos réflexions, recherches, envie… », s’y exprime un antagonisme de fond entre lesbiennes radicales et lesbiennes féministes

28 avril 1981 : lors d’un meeting de l’association Choisir, le candidat François Mitterrand répond aux questions de Josyane Savigneau et de Gisèle Halimi : « L’homosexualité doit-elle cesser d’être un délit ? » François Mitterrand répond « Oui… Nous n’avons pas à nous mêler de juger les mœurs des autres… Il n’y a pas de raison de juger le choix, c’est dans la loi de la nature, suivant les goûts, peu importe » ; Pierre Bérégovoy, membre de l’équipe de campagne du candidat, déclare pendant la campagne: « L’homosexualité ne doit entraîner sous aucune forme, ni inégalité, ni discrimination. Un projet de loi sur cette question sera élaboré »

Mai-Juin 1981 : immédiatement après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, une délégation du CUARH est reçu au siège du PS, rue de Solférino, puis aux ministères de l’Intérieur, de la Santé, de la Solidarité nationale, puis à l’Hôtel Matignon ; grâce à des subventions (émanant de municipalités socialistes ou du ministère de la Culture) le CUARH peut engager son premier salarié

Mai 1981 : à Aix en Provence, parution du n°1 d’Exilées, bulletin d’un collectif

Mai 1981 : Daniel Guérin écrit dans Gai Pied la nouvelle l’Ange Gabriel qui raconte l’histoire d’amour entre un homme d’âge mûr et un jeune marin, nommé Gabriel, d’une vingtaine d’année, dans les années 1950, où le matelot « a la capacité de prendre du plaisir sans se forcer avec les deux sexes » mais le « formidable consensus bourgeois » et « l’écrasante pression de la morale » l’amènent à choisir le sexe opposé, dès lors l’homosexualité doit devenir politique pour se défendre face aux valeurs bourgeoises et puritaines qui tentent de la détruire

2 mai 1981 : Fabrice Emaer, propriétaire du Palace, célèbre boite de la rue Montmartre, appelle à voter François Mitterrand, quelques semaines après que celui-ci ait répondu à Gisèle Halimi qui l’interrogeait lors d’un meeting féministe « Si vous êtes élu, est-ce que l’homosexualité cessera d’être un délit ? » : « Mais absolument, j’en ai pris l’engagement, absolument »

10 mai 1981 : élection de François Mitterrand à la présidence de la République ; le Monde estime 2 jours après que « le vote homosexuel » a « contribué à la victoire du nouveau président », rappelant la déclaration du candidat Mitterrand du 29 avril 1981 « L’homosexualité doit cesser d’être un délit », le n° de juin du journal Gai Pied titrera « 7 ans de bonheur ? » ; après l’élection de François Mitterrand, plusieurs mesures seront prises avec rapidité : circulaire Defferre pour la limitation du fichage homosexuel et du contrôle d’identité sur les lieux de drague (12 juin), dissolution de la brigade homosexuelle à la préfecture de police, la classification de l’OMS faisant de l’homosexualité une maladie mentale n’est plus reconnue par la France (la notification du gouvernement est du 12 juin)

27 mai 1981 : à Toulouse, lors de la présentation du livre Les Hommes au triangle rose à la librairie Ombres blanches, Jean-Pierre Joecker, l’éditeur, rencontre Pierre Seel qui lui confie avoir été déporté pour homosexualité ; deux mois plus tard il viendra interviewer longuement Pierre Seel

Juin 1981 : à Aix-en-Provence, Patrick Cardon (suppléante Marie Meyer) se présente aux élections législatives avec la liste Alternative 81, avec le slogan « Aix c’est fou, Mouvance c’est chic ! » avec le soutien et l’aide financière du PSU ; la liste présente 18 propositions générales (sur le nucléaire, la réduction du temps de travail, le référendum d’initiative populaire, etc.) et 12 propositions spécifiques (suppression de l’article 331 al.2, destruction des fichiers de police, reconnaissance des couples, adoption, changement de sexe pour les trans, etc.) , Henri Amouric en est le concepteur (Patrick a des réserves sur ce programme « Je ne suis pas sûr que plus de droits amène plus de libertés, au contraire » dira-t-il plus tard, « même si je suis évidemment heureux de ces nouvelles libertés ») ; la liste remporte 1% des suffrages ; l’Eventail sert de QG électoral

Juin 1981 : en début de mois, mort des Marie-Andrée Schwindenhammer (1909-1981) à 72 ans, arrêtée et déportée au camp du Struthof en 1943, elle a créé l’AMAHO (Aides aux malades hormonaux) en 1965, dont elle était l’énergique présidente ; jeune homme, diplômée de chimie biologie, elle a servi dans l’armée  comme capitaine au service des transmissions avant d’être arrêtée et que les nazis lui injectent des hormones malgré elle pour forcer sa nature ; il y avait 1500 adhérents à l’AMAHO ; le 12 juin 1981 de nombreux transexuels français se réunissent à Paris en sa mémoire

Juin 1981 : aux USA, apparition d’infections rares chez des hommes jeunes et homosexuels en Californie

Juin 1981 : aux USA, Audre Lorde qui se présente comme « noire, lesbienne, féministe, mère, guerrière, poétesse, survivante du cancer » prononce un discours d’ouverture lors de la conférence de l’Association nationale des études feministes à Storrs dans le Connecticut De l’usage de la colère : la réponse des femmes au racisme (The uses of anger : women responding to rtacism) ; elle interviendra lors de la 3ème foire internationale du livre féministe de Montréal en 1988 sur le thème Le racisme, l’écriture et la construction du pouvoir

5 juin 1981 : aux USA, le Bulletin épidémiologique, hebdomadaire, des CDC (centers for desease control) d’Atlanta – le MMWR (Morbidity and mortality weekly report) – annonce l’apparition de ce qui pourrait être une nouvelle maladie les cas ont été diagnostiqués entre octobre 1980 et mai 1981 chez des patients hospitalisés dans 3 hôpitaux de Los Angeles, le 4 juillet le MMWR consacrera sa 2ème publication du 4 juillet 1981 à des observations concernant des cas de kaposi et d’infections pulmonaires atypiques

5 juin 1981 : à Paris, le Dr Willy Rozenbaum établit un lien entre l’information qu’il reçoit des USA et les signes cliniques d’un de ses patients

6 juin 1981 : le chanteur Jean Guidoni, 31 ans, donne un concert à l’Olympia, il a pour modèle Damia, Fréhel, Léo Marjane, les rencontres musicales qu’il a eu avec Michel Cywie et surtout Pierre Philippe sont décisives, il chante les rencontres homosexuelles Moi je marche dans les villes, les banlieues, les bidonveilles, ou Mousatchu chercche baraqué, pour bonne baise sous toutes ses formes, ou encore Ne sois pas regardant : c’est l’amour pour rien, Dans l’ombre du balcon il y a de vieilles fiottes ; « Tantôt câlin, tantôt micheton, irradié de toutes les couleurs glauques du désespoir, il a un exceptionnel talent d’interprète, écrit le journaliste Patrice Delbourg, il fait figure d’affamé, d’amanr halluciné en quête de tendresse à fourrure »

12 juin 1981 : circulaire Defferre pour la limitation du fichage homosexuel et du contrôle d’identité sur les lieux de drague ; dissolution de la brigade homosexuelle à la préfecture de police ; la classification OMS, adoptée par la France en 1968,faisant de l’homosexualité une maladie mentale (trouble mental) n’est plus reconnue ; le préfet Maurice Grimaud, directeur de cabinet de Gaston Defferre, écrit au responsable de la police nationale : « Mon attention est appelée sur l’attitude des services de police à l’égard des homosexuels… », il nomme « le groupe d’inspecteur spécialisé dans le contrôle des établissements fréquentés par les homosexuels », « les contrôles d’identité pratiqués dans les lieux de rencontre (où) des personnes seraient fichées comme homosexuels », il conclut « conformément aux orientations définies par le président de la République, aucune distinction, aucune discrimination, ni, à plus forte raison, aucune suspicion ne sauraient peser sur des personnes en raison de leur orientation sexuelle »

14-21 juin 1981 : les élections législatives donnent la majorité aux partis de l’union de la gauche ; à Nanterre un candidat, Maurice Cherdo, se présente comme ouvrier homosexuel, ancien délégué CGT, il est soutenu par l’OCT (organisation communiste des travailleurs) et par le CUARH

18 juin 1981 : un cortège lesbien (avec Espaces, les Feuilles vives, Lesbia, MIEL, le Trèfle) ouvre la marche mixte du CUARH avec les mots d’ordre Pour que vivent nos amours, Le lesbianisme est politique ; pour la 1ère fois des chars commerciaux défilent

20-21 juin 1981 : 2ème rencontre des lesbiennes radicales à Saint-Sulpice, Beauvais, avec le tract Bas les masques

28 juin 1981 : mort de la chanteuse suédoise Zarah Leander (Sara Stina Hedberg 1907-1981), chante en 1931 dans l’opérette La Veuve joyeuse de Franz Lehar,  tourne à Berlin en 1936 pour les studios UFA Paramatta, bagne de femmes et La Habanera de Douglas Sirk, mélodrames dont les chansons deviennent célèbres ; elle prend la place de Marlène Dietrich, partie pour Hollywood, dans le coeur du public, tourne 8 films pour l’UFA, vivant avec ses enfants dans une résidence somptueuse de Berlin, en 1942 elle se brouille avec son protecteur Joseph Goebbels, et rentre en Suède lors des premiers bombardements sur la ville, poursuit sa carrière de chanteuse à Stockholm, Hambourg et Vienne, jusqu’en 1978 et devient une icone gay pour sa liberté sexuelle

Juillet 1981 : création de l’association Fréquence Gaie, Patrick Oger, qui a apporté 100 000 francs en est le président, il finance les installations et la location d’un petit appartement rue de Belleville ; la diffusion commencera en septembre

Juillet-août 1981 : parution en France du livre de Heinz Heger qui avait rompu le silence en Autriche en 1972 et raconté son arrestation lorsqu’il était jeune étudiant à Vienne « Les hommes au triangle rose, journal d’un déporté homosexuel (1939-1945) » ; Guy Hocquenghem préface le livre «  Les nazis avaient seulement forcé la dose ; mais l’élimination, en tous cas l’enfermement, des fous, des homosexuels, de ceux dont le comportement relève de la médecine et non de la politique ou de la nationalité, il n’y avait pas un seul pays allié qui ne l’ait aussi pratiqué »

Juillet 1981 : aux USA, le New York Times publie le 1er article de presse relatif au sida, suite à une étude du Center fot Disease Control (CDC) d’Atlanta

10-17 juillet 1981 : à Marseille, organisation des 2èmes UEH (Université d’été homosexuelle) par le GLH ; avec Mykonos, mixte, organisé par le GLH et Lesbos non mixte, organisé par le groupe lesbien de Marseille  les thèmes : symbolique du vêtement, identité-diversité, éducation, sexualité, lesbiennes et féministes, pourquoi luttons-nous ? et nuit du cinéma lesbien le 15 juillet ; l’assemblée générale finale Lesbos conclut sur la nécessaire autonomie du mouvement lesbien (une rencontre autonome des lesbiennes se tiendra à Paris en novembre 1984) ; Gérard Goyet (animateur du groupe de musique Verte Fontaine, puis du Chocolat-Théâtre) organise les festivités du GLH et des UEH (de 1981 puis les UEH suivantes 1983, 1985 et 1987) ; les lesbiennes sont environ une centaine, elles sont accusées de pudibonderie lorsqu’elles dénoncent le fait que les hommes exposent leur sexualité d’une façon qu’elles perçoivent comme agressive selon ce que relate Homophonies n°11 de septembre 1981

11-26 juillet 1981 : dans le Gard, rencontre internationale des Lesbiennes féministes à Euzières, 3ème camping lesbien, avec de nombreux ateliers (mécanique auto, etc.), c’est le lieu de fondation du MIEL, avec 150 lesbiennes venues d’une quinzaine de villes ; d’autres coordinations se réuniront à Grenoble 29-31 mai 1982 et Nantes 30 octobre-1er novembre 1982 dans les Maisons des femmes

Août 1981 : à Paris, création du MIEL (Mouvement d’information et d’expression des lesbiennes) qui « choisit de se réunir à la Maison des femmes parce que nous sommes lesbiennes féministes », elles y tiennent la cafétéria l’Hydromel les vendredi et samedi soir, à l’inverse plusieurs groupes lesbiens radicaux porteront des projet de local lesbien éphémères comme Orange Mauve en 1982 et Centre lesbien d’échanges en 1983, le Front des lesbiennes radicales de leur côté projettent en 1981-1982 d’ouvrir un espace lesbien qui au-delà des lesbiennes, soit « ouvert aux femmes qui veulent s’informer et s’interroger » ; d’autres groupes lesbiens choisissent de quitter les maisons des femmes, comme à Amiens, à cause des conflits entre lesbiennes radicales et féministes ; à Marseille le groupe des lesbiennes créera fin 1981 La Douce Amère qui passe de la Maison des femmes à son propre local rue Benoit Malon, puis après avoir animé des permanences lesbiennes à la Boulangerie gay tenue par le GLH, elle choisiront en 1983 de reprendre le local de la Maison des femmes qui fermera faute de forces militantes ; à Grenoble et à Toulouse les maisons des femmes largement animées par des lesbiennes continueront à garder le nom maison des femmes

4 août 1981 : loi n°81-736 selon laquelle l’ensemble des personnes condamnées en vertu de l’ordonnance du 8 février 1945 confirmant l’ordonnance de 1942 sur la pénalisation de l’homosexualité (outrage public à la pudeur et acte impudique avec un mineur du même sexe) sont amnistiées

25 août 1981 : mort de l’auteure américaine Kathryn Hulme (1900-1981), elle est célèbre par son roman à succès The Nun’s story en 1956 – qui sera adapté au cinéma – en partie autobiographique, car elle a rencontré une infirmière belge, Marie Louise Habets, ancienne religieuse, qui est devenue son amante et sa compagne  ; dans The Undiscoverd Country elle raconte ses liens avec les membres du groupe The Rope, Jane Heap, Elisabeth Gordon, Solita Solano,  Margaret Anderson, Louise Davidson et Alice Rohrer qui étudiait l’ésotérisme avec le philosophe mystique d’origine russe Georges Gurdjieff, considéré parfois comme un escroc et un charlatan

Septembre 1981 : premier article dans Gai Pied sur « l’amour à risque », le « cancer gay » apparaît, Michel Chomarat rédige la notice nécrologique de Pierre Jeancard, mort du SIDA, auteur du livre culte La Cravache ; pour Gai-Pied, Jean le Bitoux a obtient la dernière interview de Jean-Paul Sartre, peu de temps avant sa mort

Septembre 1981 : à Paris, apparaît un nouvel instrument de lutte en faveur de la tranquillité publique, la Brigade des Parcs et Jardins, après qu’un parisien ait expliqué au JDD (journal du dimanche) qu’il n’est plus possible de se promener la nuit au Bois de Boulogne sans être agressé par des prostituées et des homosexuels sans pudeur ; dès lors Jacques Chirac, maire de Paris, met en place une surveillance systématique des endroits susceptibles d’être fréquentés par cette faune, avec 80 agents, embryon de la police municipale réclamée par le maire ; les homosexuels en feront les frais, en août 1983 et en août 1985, par exemple ; déjà en avril 1979 le député RPR du XIème arr., Alain Devaquet, voulait fermer le square Maurice Gardette la nuit en réponse à une pétition se plaignant de la « présence de chiens » et en mai 1980 la députée RPR, Nicole de Hautecloque, avait déposé un projet de loi relative à « la protection de certains lieux  publics contre les présumés auteurs d’attentats aux mœurs ou d’incitation à la débauche »

Septembre 1981 : création en France de Bent, de Martin Sherman, au Théâtre de Paris, mise en scène par Peter Chatel et adaptée par Léna Grinda, après un large succès à New-York, Londres, Bruxelles et en Allemagne, Bruno Cremer qui joue le rôle de Max commente : « Il y a une richesse formidable de Bent, l’homosexualité y est traitée d’une manière telle que cela touche tout le monde »

10 septembre 1981 : à Paris, 1ère émission de la radio libre Fréquence Gaie ; de 1979 à 1981 la radio était une radio pirate lorsque de plus en plus de radios associatives réclamaient un accès aux ondes hertziennes ; plus de 100 personnes participent à l’animation de la station ; le succès est immédiat, la radio passe en six mois à 40 000 auditeurs-trices, dans le peloton de tête des radios libres les plus écoutées d’Ile de France ; puis à 100 000 à 150 000 auditeurs et auditrices, témoignant du besoin d’expression des gays et des lesbiennes sur tous les sujets sociétaux ; l’émission nocturne Pêche à la ligne animée par Pablo Rouy côté garçons et par Danièle Cottereau côté filles, est un succès, comme celle de Michel Coquet Double face pour les petites annonces, ainsi que le lundi des strip teases pour les candidats en direct de Jean-Luc Hennig et Guy Hocquenghem, et les équipes de reporter express qui se rendent le jeudi au domicile des auditeurs pour vérifier leurs directeur anatomie et leurs pratiques sexuelles ; Danielle Cottereau – par ailleurs maquettiste d’Homophonies – anime avec Cathy Bernheim deux autres émissions Sapho night et Amazones du soir, bonsoir ! ; mais la fronde des journalistes se développe contre le pouvoir arbitraire de Patrick Oger, président de l’association, qui tient à garder l’anonymat (connu sous le nom de Patrick O.) et dont la gestion des comptes provoque le soupçon (alors qu’il n’y a que 3 membres, président, trésorier, secrétaire) ; parmi les journalistes il y a Geneviève Pastre, Jeffrey Cancel, Gilles Casanova, Audrey Coz, Alain Leroy et bien d’autres ; Christophe Vix-Gras rappellera que dans les faits Fréquence Gaie avait existé comme radio pirate de 1979 à 1981 « entre la cuisine de Copi et le salon de Delphine Seyrig » avant d’être autorisée en septembre 1981 lors de la libéralisation de la bande FM ; en 1982 la radio sera autorisée, deviendra radio communautaire associative, puis sous forme de société sous le nom de Future Génération, exploitée par Gai Pied Hebdo, présidée par Geneviève Pastre, Christophe Vix-Gras et Guillaume Dustan y seront journalistes ; elle prendra le nom de FG sous la houlette d’Henry Maurel, futur cofondateur des GPL (Gay pour les Libertés), il y restera 7 ans, Hugues Fischer en sera directeur technique ; Patrick Thévenin tournera un film Kill me with your love ou les années Fréquence Gaie qui rappellera cette histoire ; une nouvelle crise se produira en 1984, la radio, exploitée par Gai Pied Hebdo et deviendra Future Génération présidée par Pablo Rouy jusqu’en 1990

14 septembre 1981 : en Italie, parution dans l’Europeo d’un article sur le camping gay d’Ortona, dans les Abruzzes, qui s’est tenu le mois précédant à Ripari di Giobbe : « Ils étaient 300, jeunes et gay », la journaliste et son photographe se sont mêlés aux jeunes campeurs ; le 3ème « Campeggio Gay » organisé par le journal (équivalant de Gai Pied) Lambda, après Capo Rizzuto, en Calabre, et…, rassemble autour d’un noyau de militants italiens (dont Ivan Teobaldelli tante Ivana et Félix Cossolo tante Félicita), de nombreuses figures de la vie homosexuelle en émergence (l’admirable animateur napolitain Ciro Cascina, des « stars » aux vêtements flamboyants, un groupe de Trapani en Sicile qui célèbrent le mariage de Gigliola Cinquetti et David Bowie, de nombreux autres comme Mario, Stefano, Aldo, Ruben, Claudio, Franco, Gianni, Carmelina, Edoardo, ianantonio, Poppea, David, plus brillant(e)s les un(e)s que les autres), il y a quelques allemands (Detlev, Walter) et quelques Français (le danseur Eric Lagrange, le marseillais Christian de Leusse) ; ils ont organisé un rassemblement public sur la grand place de Pescara

22 septembre 1981 : les violeurs de Marie-Andrée Marion sont acquittés, lesbienne, militante féministe, Marie-Andrée faisait partie du collectif de lutte contre le viol, elle a eu le courage de refuser l’expertise psychiatrique imposée à toute victime de viol

Octobre 1981 : les députés socialistes déposent une nouvelle proposition de loi pour supprimer l’art 331 al 2

Octobre 1981 : la ministre des Droits de la femme, Yvette Roudy, encouragée par Simone Iff, présidente du Planning familial, pousse les ministères à trouver des solutions pour dépénaliser la prostitution et dé-marginaliser les professionnelles, il leur sera proposé des formations professionnelles afin de quitter le métier, un accord sur les déclarations de revenus et l’accès au droit de vote

Octobre 1981 : en Suisse, parution du n°1 de CLIT 007, concentré lesbien irrésistiblement toxique, éditée à Genève et largement lue dans l’espace francophone

Octobre 1981 : le Parlement européen émet une résolution recommandant e mettre fin à toute discrimination à l’encontre des homosexuels

Novembre 1981 : à Fréquence Gaie, la situation s’envenime, mal à l’aise avec la gestion de Patrick Oger, le trésorier et le secrétaire démissionnent et Patrick Oger exige d’obtenir le remboursement des 100 000 francs investis, il provoque une AG mais les nouveaux administrateurs de parlent toujours pas de le rembourser ce qui conduit Patrick Oger à annuler l’AG et à en convoquer une nouvelle ; le 22 novembre la nouvelle assemblée générale tourne court et le président finit par interdire l’accès au studio, s’y enfermant lui-même et appelant la police ; une semaine plus tard une nouvelle AG sera élue et Patrick Oger remboursé

14-15 novembre 1981 : rencontre nationale des Lesbiennes radicales du Front des lesbiennes radicales (FLR) à l’Ageca, à Paris, pour « élaborer une plateforme politique, faire une analyse de la situation, définir des stratégies et des objectifs concrets et envisager des moyens d’expression propres » ; une brochure contenant de nombreux textes est publiée

Décembre 1981 : le SGEN-CFDT (syndicat général de l’Education nationale) renouvelle son soutien au CUARH dans sa lutte pour l’abrogation de la loi anti-homosexuelle

Décembre 1981 : à Fréquence Gaie, la militante Danièle Cottereau fait son entrée à la radio dans un ancien magasin de Montmartre, elle est l’une des toutes premières animatrices, elle animera désormais de nombreuses émissions Coeur de Femmes, La Pêche à la ligne, Atout Coeur, Pour ou contre, Dix questions dix réponses, Cinéma de traverse, Sapho night et Amazones du soir, bonsoir, il y aura environ 25 femmes sur les quelques 140 bénévoles ; elle dira qu’en janvier 1983 il y aura 6 000 manifestants pour que la station garde sa place sur les ondes lors du tri opéré dans les radios parisiennes et qu’en 1984 la radio se dirigera vers un modèle commercial  qu’elle refusera de cautionner

Décembre 1981 : parution du n°14 de Homophonies, mensuel d’information et de liaison des lesbiennes et des homosexuels du CUARH, il comporte un dossier Police, un article sur l’affaire Dugué, des textes sur féminisme lesbianisme et homosexualités et sur le GLH de Nantes ; les rédacteurs sont en particulier Jan-Paul Pouliquen, Hervé Liffran et de Françoise Renaud

Décembre 1981 : à Marseille, l’association Verte Fontaine, installée Place Thiars, animée par Gérard Goyet, gérée par Jean-Charles Pavia, présente plusieurs spectacles (des concerts des groupes Leda Atomica, Fruit et Primeur et l’afro-jazz d’Equinoxe, et une soirée Mime-Poésie avec Mimi et Thomas Wounintsky), avec une galerie-bar et des soirées restaurant et animations diverses ; après deux mois d’animation en octobre des soirées franco-maghrébines et tunisiennes, en novembre des récitals de chant, du café-théâtre et des concerts de jazz et de musique classique ; l’association a été créée en décembre 1980, son conseil d’administration est constitué de membres du GLH de Marseille (Pierre Jolivet de Thorey, Michel Richardot, Christian de Leusse, Alain Abignoli, Jean-Pierre Léonetti) et de l’expert financier Patrick Orenstein, Gérard et Jean-Charles sont emplyés en qualité d’emplois d’utilité collective ; le groupe de musique Verte Fontaine (Eric Fouquet, Norbert Licciardi, Michel Zenino et le chanteur auteur des textes Gérard Goyet) tourne dans les salles de la ville depuis 1978 ; de nombreux stages de danse contemporaine sont animés en 1981 et 1982,  par Erik Lagrange et Anne-Marie Chovelon ; en 1982 Verte Fontaine proposera une semaine de la danse en mai-juin 1982 au théâtre Bompard (avec une chorégraphie d’Eric Lagrange et 3 autres danseurs et danseuses dont Christophe Haleb) ; parallèlement une autre association RIM (Raymond Martinez, arts plastiques, Michel Mourlot, architecture, et Ingrid Maillot, décoration) propose des animations multiples à la Verrerie de Saint-Victor

Décembre 1981 : à Aix-en-Provence, la galerie bouquinerie l’Eventail du 5 petite rue Saint-Jean, qui se veut un centre associatif moderne de culture « camp« , animée par Patrick Cardon, propose de nombreuses animations autour de Jean Genet, Dostoïevski, Marguerite Yourcenar, Jean Cocteau, Marcel Jouhandeau, Federico Garcia Lorca, Oscar Wilde, Michel Tournier, Violette Leduc ou encore Stephan Zweig ; Daniel Guérin vient animer un débat sur « d’une dissidence sexuelle au socialisme » où il expose le lien intrinsèque entre ses 2 combats

Décembre 1981 : en Belgique, Eliane Morissens est révoquée après sa participation à une émission de télévision où elle déclarait qu’on lui avait refusé la direction d’une école parce qu’elle était lesbienne

8 décembre 1981 : à Lyon, création de l’ARIS (Accueil Rencontre Information Services) animée par Michel Branchu ; elle mettre du temps à trouver un local, ce sera dans l’impasse Polycarpe, sur les pentes de la Croix Rousse, quartier aux initiatives politiques alternatives nombreuses

12 décembre 1981 : à Paris, la revue Masques célèbre dans les locaux de la librairie Les Mots à la bouche le prix Renaudot de Michel del Castillo pour La Nuit du décret

12 décembre 1981 : à Lyon, manifestation de protestation contre les discriminations à l’égard des homosexuels pour qu’un couple de lesbiennes puisse conserver la garde de leur enfant, derrière la banderole (créée lors du 1er mai 1979) »Pédés et lesbiennes en lutte »

20 décembre 1981 : Robert Badinter, Garde des Sceaux, prend la parole devant un hémicycle clairsemé, et des tribunes du public pleines à craquer, il cite Cambacérès et déclare « il n’est que temps de prendre conscience de ce que la France doit aux homosexuels, comme à tous les autres concitoyens » s’est exclamé Robert Badinter qui se souviendra longtemps du « chahut invraisemblable » qu’il a déclenché à l’Assemblée nationale

31 décembre 1981 : l’évêque des Strasbourg, Mgr Elchinger refuse de louer une salle à l’occasion du Congrès de ILGA, il avait déclaré peu auparavant que les homosexuels étaient des infirmes

31 décembre 1981 : 11 cas de sida ont été recensés en France ; 17 cas cumulés seront identifiés a posteriori.

 

1982-1984 : à Dijon, ce sont les années d’existence du groupe homosexuel militant Diane et Hadrien ; depuis la disparition du FHAR en 1974, un GLH s’était constitué à dominante masculine et marxiste s’était constitué, liant la libération homosexuelle aux luttes des femmes ;  le 4 avril 1981 une trentaine de militants dijonnais ont participé à la 1ère Marche nationale, avec en particulier Jean (Boyer)-Cavailhès comme animateur ; lors de l’élection présidentielle de 1981 le GLH a sollicité les partis politiques (le PS et le PSU en particulier) et des associations comme le Planning familial  pouret la fin de la classification de l’homosexualité comme maladie mentale par l’OMS  ; si Diane et Hadrien est issu du GLH son objectif est un peu différent il n’est pas politisé, il veut réunir tous les homosexuels, mais dans une démarche de militantisme homosexuel, avec l’objectif d’ouvrir un local, lieu de rencontres, de militantisme et de convivialité, grâce à une souscription (dite « cotisation exceptionnelle »), dans une ville dépourvue de tout lieux d’accueil (ni bar, ni boite de nuit) ; les statuts du GLH ont été déposés en septembre 1981 (dont l’objet est « association de bienfaisance ») et le local a été trouvé en décembre 1981 (le bail a été signé à titre personnel par un membre de l’association) dans un quartier bourgeois de la ville, les statuts de DH sont déposés le 21 janvier 1982, le GLH continue à exister en utilisant les locaux de DH ; le 12 février 1982 le local de DH est inauguré en présence de la presse ; le GLH a mené une importante campagne publicitaire (600 affiches, 2 500 tracts, 5000 invitations) parlant du 1er lieu homosexuel de Dijon et de Bourgogne ; Libération parle de « Première gai à Dijon », sous la signature de Jean-Pierre Joecker et Jean Boyer parlera de La saga Diane et Hadrien dans Masques à l’été 1982 ; le samedi 13 et dimanche 14 février 1982 la coordination nationale du CUARH se réunit dans ses locaux, avec une quarantaine de délégué-e-s de 15 villes différentes et 250 personnes participent à l’apéritif et le bal du samedi soir ; le 15 février 1982 FR3 présentera un reportage sur le rassemblement du CUARH ; plus de 60 cartes d’adhésion sont vendues dans les 2 semaines qui suivent et bientôt DH rassemblera jusqu’à 150 adhérents (adhésion à 100 francs par an) ; très vite l’association est confrontée à un problème de voisinage, le propriétaire recevant une pétition de 6 locataires le sommant de choisir « entre nous et les pédés », DH regroupe alors autour d’elle différents syndicats et groupes politiques (FO, LCR, etc.) et sollicite le soutien d’élus de la ville et du département, si bien que l’agence immobilière abandonne l’idée de résilier le bail, toutefois des courriers de lecteurs dans le journal le Bien Public proteste contre les affiches et le reportage de FR3 (« ces gens là devraient rester dans l’ombre », etc.) et l’Association familiale catholique de Côte d’Or s’insurge contre ‘l’attentat aux moeurs et à la pudeur »  ; DH sollicite des subventions et propose des activités variées, rencontres, discussions, expositions, conférences (comme avec Christian Gury sur Arcadie et le pasteur Doucé du CCL sur les minorités sexuelles), bar, cuisine, coin vidéo, bibiliothèque de prêt, consultation de Gai Pied et de Masques, trois bals dans l’année 1982, soirées exceptionnelles femmes, réunions du GLH, assemblées de DH, permanence d’accueil, avec ouverture de 19h à 22h30 et de 16h30 à 22h30 en week-end, une animatrice sera recrutée en 1983 (comme Emploi d’initiative locale) pour faire l’ouverture, le reste des horaires dépendant de bénévoles qui ne sont pas toujours là… ; DH participe à la fédération des GLH qui existe d’abord sous le nom de FLAG (fédération des lieux associatifs gays) , ainsi qu’au CUARH, il lance de nombreuses campagnes pour les droits des homosexuels ; il faudra attendre 1995 pour qu’un  nouveau mouvement homosexuel se crée dans la ville avec CIGaLes (collection incroyable de gays et de lesbiennes)

1982-1983 : en Côte d’Ivoire, le Pr Jacques Moreau voit des patients nouveaux, pris de diarrhées, de fièvres ou de tuberculose, marqués par la maigreur – en Afrique centrale apparaissent des symptômes comparables, ceux du LAV – un jeune homosexuel qui se prostituait a fini par mourir, apparaissent aussi des femmes enceintes et de nombreuses transfusions se font sans vérification, les test Elisa ne sont pas fiables ; les autorités refusent de déclarer les cas à l’OMS, puis par hasard lors d’une rencontre médicale à Bangui (en République Centrafricaine) on apprend qu’il y a des dizaines de cas en Côte d’Ivoire, des chercheurs américains viendront faire une 1ere enquête, puis Aides contribue à la création d’une association soignants-patients dans laquelle une religieuse s’engage fortement, mais il y a toujours un déni politique et peu de médecins ivoiriens se mobilisent

1982 : Cinéma : « Querelle » de R.W. Fassbinder (d’après Jean Genet), « Le Labyrinthe des passions » d’Almodovar, « Victor Victoria » de Blake Edwards, « Coup de foudre » de Diane Kurys. Variétés : Mylène Farmer (Maman a tort), Soft Cell (Tainted Love), Danielle Messia (De la main gauche)

1982 : mort du couturier Pierre Balmain (1914-1982), il a fait ses classes chez le couturier parfumeur britannique Edward Molyneux et chez le couturier parisien  Lucien Lelong, et fondé sa propre maison de couture en 1945 ; il laisse la maison à son plus fidèle ami et collaborateur Erik Mortensen

1982 : Benoît Duteurtre, jeune étudiant havrais en art et histoire de 22 ans, arrière-petit-fils du président René Coty, se plonge en même temps que bien d’autres dans la vie parisienne, les Bains Douches, le Palace, les tapins de la rue Sainte-Anne, les clubs de jazz, haschich et coke, il le racontera dans ses livres Sommeil perdu 1985 et A nous deux Paris 2012

1982 : dans un article L’homosexualité masculine, ou le bonheur dans le ghetto ?, du livre Sexualités occidentales, dirigé par Philippe Ariès et André Béjin, Michaël Pollak écrit « On ne nait pas homosexuel, on apprend à le devenir … Les écrits actuels s’inscrivent dans les tentatives de transformation du stigmate en critère d’appartenance à un groupe social en voie d’émancipation. Encourager le coming out, conçu comme l’acceptation individuelle de l’identité sexuelle, mais aussi de l’appartenance à un mouvement social qui rend possible à un grand nombre cette identification d’une façon positive, contribue à faire intervenir le critère de l’orientation sexuelle dans la perception et la définition de tout rapport social » ; Philippe Ariès explique l’acceptation récente des homosexuels dans les sociétés occidentales par la généralisation du modèle « unisexe »

1982 : Hugues Demusy, jeune étudiant en journalisme, venu de Grenoble, racontera son initiation à l’homosexualité en arrivant au Palace : « Personne ne m’a encore proposé de m’offrir un verre. Je décide d’aller aux toilettes pour remplir mon verre d’eau. il me faut pousser la grande porte à battant, qui mène au grand couloir, où sont alignés les filles et les garçons les plus extravagants, se jaugeant les uns les autres, avec appétit, ou le plus souvent avec le plus grand mépris ! Je me fraye un passage entre ces corps sans en mener large, en n’osant dévisager tous ces inconnus.Chaque rire me parait être provoqué à mes dépens. Le brouhaha et la puissance de la sono, qui fait trembler les murs et le plancher, m’enivrent un peu plus. Mon regard s’égare sur les plafonds ouvragés et je prends conscience de la magnificence de cet ancien théâtre et de l’incongruité du lieu, dédié aujourd’hui à la modernité. Juste le temps de me faire bousculer par une diva moulée dans une robe en strass, dont la repousse de a barbe bleuit le ba du visage. Elle (il) m’entoure de ses bras et m’embrasse goulûment, pour toute excuse. Gêné par ce témoignage de tendresse auquel je ne suis pas encore habitué, j’emprunte l’escalier étroit qui mène aux lavatories. Ici, il y a beaucoup de onde et le spectacle continue. Là aussi il faut jouer des coudes et trouver de l’intimité tient du défi. Ces deux garçons qui se caressent à côté de moi n’en ont pas besoin a priori. Surtout ne pas regarder comme une oie blanche ! Je juge plus prudent de remplir mon verre au robinet, puis de m’extraire de ce lieu aux odeurs peu ragoûtantes. Manque de chance, un coude égaré me bouscule et mon verre se vide par terre. Le propriétaire du bras, que je découvre alors, rit et me propose en hurlant à mon oreille de m’offrir un verre. J’accepte en rougissant et le suit immédiatement à travers le hall. L’homme d’une quarantaine d’années est très séduisant. Son smoking dont la chemise au col cassé laisse apparaître la toison brune qui doit recouvrir sa poitrine attire mon regard et mon désir. Mes yeux sont happés par ce détail incongru. Nous parvenons au bar du 1er étage, moins bondé, où des serveurs vêtus de combinaisons rouges officient. Ici c’est plus calme et mon interlocuteur peut enfin se présenter. Il se prénomme Jean-Charles, est marié et habite Neuilly. J’apprécie qu’il me parle de son métier et n’en profite pas pour m’en mettre plein la vue. A moins qu’il n’occupe une fonction officielle qui l’oblige au silence… de mon côté; j’ai vite fait de l’informer que je suis étudiant en journalisme, à la recherche d’expériences inédites… ça le fait sourire, mais il ne semble pas comprendre l’invitation. Pour mi, un whisky-coca et pour lui une vodka-orage. Il tutoie le serveur et lui laisse un pourboire généreux, puis me plante là ! »

1982 : à Lyon, les Lilith Folies créent à la Villa Lilith la pièce Vegetal Palace, pensée comme une suite d’En Vol, inspiré de Kate Millett, dans laquelle apparaissent Gertrude Stein, Renée Vivien, Natalie Barney ou encore Madame de Lamballe, pour fêter l’amour lesbien ; la troupe créera de nombreuses autres pièces de 1981 à 1984 : Le Désert de Le Clezio, Les Variations Goldberg de Nancy Houston, Les Contemplatives de Catherine Baker, La Triste Histoire de la séquestrée de Poitiers d’après André Gide, Chaste et flétrie d’après Charles Mérouvel, Mars de Fritz Zorn, Gioco dell’oca d’après Sophie Calle, Ceux qui prennent le large de Patricia Highsmith, Le Journal d’un séducteur d’après Soren Kierkegaard, Don Juan meurt en douce d’Edith Guedj et enfin le film-vidéo Histoire en prison

1982 : parution de Le Livre de l’intranquilté du Portugais Fernando Pessoa, un immense talent, une sorte de génie qui dépasse l’artiste virtuose

1982 : aux Pays-Bas, création de l’association Martijn, organisation qui milite pour faire accepter les relations sexuelles entre adultes et enfants, créée en référence à un magazine lancé dans les années 1970 par un détenu qui avait des relations sexuelles avec l’enfant prénommé Martijn ; l’assocuiation aura un important retentissement dans les années 1990, avec près de 700 membres ; elle sera dissoute sur décision de la cours suprême en 2014

1982 : en France, institution du 8 mars journée des femmes ; l’ONU avait insitué cette journée dès 1977

1982 : le Parlement européen vote une résolution « sur la discrimination dont sont victimes les transsexuels » et la recommandation 1117 qui invite les Etats à accorder le changement d’état-civil aux transsexuels opérés, le patient travail de lobbying du Pasteur Doucé a contribué à ce vote ; parallèlement en France le sénateur Caillavet tente de faire adopter une loi pour améliorer le sort des transsexuels

 1982 : en Grande-Bretagne, à Londres création des Hall-Carpenter Archives (archives gay et lesbiennes)

1982 : aux USA, création de la Kaposi’s Sarcoma Foundation, ancêtre de la San Francisco AIDS Foundation

1982 : aux USA, Jack Fertig (Sister Boom Boom, de son nom complet Sister Rose of the Bloody Stains of the Sacred Robe of Jee-sus) se présente aux élections municipales à San Francisco sous le nom de Nun of the Above, en habits de Sœur – soutenu officieusement par les SPI, apolitiques -, il développe des thèmes sociaux tout en brocardant les politiciens et les milieux d’affaires qui le soutiennent ; ils recueillent 23 124 suffrages et se classent 9ème sur 22 candidats (à la suite de cette mauvaise surprise, les candidats seront obligés de se présenter sous leur vrai nom) ; lors de la Gay Pride , les SPI sous l’impulsion de Sister Florence Nightmare, infirmier, réaliseront un 1er dépliant de prévention sur le sida, intitulé Play Fair

1982 : aux USA, à Santa Monica en Californie, Kareen et Barry Mason deviennent propriétaire de Circus of Books, emmblème de la sociabilité homosexuelle du quartier depuis les années 1960, où l’on trouve tous les livres, documents et produits afférents aux thématiques LGBTQ ; alors que la pornographie gay a des ennuis fréquents avec la censure, ils diffusent de nombreux films et bientôt en deviennent producteurs, en particulier avec la vedette du porno gay des années 1980-1990, Jeff Stryker ; ce commerce prospèrera jusqu’à le fin des années 2010

1982 : suite aux propos homophobes de Mgr Elchinger, archevêque de Strasbourg, Pierre Seel sort de son silence, et annonce publiquement son homosexualité, il devient l’unique citoyen français à avoir témoigné de sa déportation pour homosexualité

1982 : au Portugal, la loi décriminalise l’homosexualité

1982 : au Vatican, Jean-Paul II élève l’Opus Dei – créé en Espagne franquiste par José Maria Escriva de Balaguer – au rang de prélature personnelle ; l’œuvre promeut les principes fondamentalistes sur les questions de l’éthique familiale et bio-médicale : IVG, union homosexuelle, conception assistée, recherche sur les cellules souches embryonnaires, etc. ; le recadrage idéologique opéré par Jean-Paul II et Benoit XVI dans les années 1980-2000 contribuera à normaliser l’image de l’Opus Dei parmi les catholiques

1982 : le groupe lesbien autonome de Rennes a créé le GL (Groupe Lesbien) en 1978 en prenant ses distances du GLH, première association lesbienne de la ville, en 1982 des militantes créent l’association Femmes entre elles (FEE) tournées vers la convivialité, les loisirs et la pratique d’autodéfense féminine le Wendo, avec des permanences à la MJC La Paillette, les stages de Wendo donneront naissance à une autre association la Cité d’Elles (CdE) en 1983 qui se définit comme association féministe ; sur radio Vilaine se tient une émission consacrée aux lesbiennes tous les 15 jours ; en 1983 se créera la Coordination lesbienne de l’Ouest, la FEE jouera un rôle structurant dans cette coordination au cours des années 1980 ; en 1985 la FEE cofondera les Goudous télématiques, minitel par et pour les lesbiennes ; des échanges avec les lesbiennes de Toronto se feront avec l’aide du Gaia’s International Travel Guide pour trouver des solutions d’hébergement en Bretagne

1982 : à Paris, création de Femin’autres par 6 femmes, réseau de solidarité dans la création d’entreprise ; création d’un comité de soutien à Eliane Morissens ; ouverture du restaurant l’Intempestive par des Lesbiennes radicales, dans le quartier des Halles (il dure quelques mois)

1982 : à Marseille, les militantes lesbiennes ouvrent la Douce Amère (dans l’ancienne Maison des femmes, rue Benoit Malon, très proche de la rue de Bruys où est installée la Boulangerie Gay) avec Sylvie, Gomina, Agnès ; fêtes, permanences, ateliers, repas, soirées guitare, etc.) ; le GLH installé à proximité depuis avril 1981 ne leur a pas laissé toute la place qu’elles souhaitaient (en particulier l’alternance de l’utilisation des locaux pour les soirées du samedi), elles choisissent d’avoir leur propre local

1982 : en RFA, mort de Rainer Werner Fassbinder, à l’âge de 37 ans, auteur prolifique de 17 pièces de théâtre (dont Anarchie en Bavière, Liberté à Brème, Gouttes dans l’océan, Village en flammes, le Bouc, Du sang sur le cou du chat, Les Larmes amères de Petra von Krant 1972, Ordures, la ville et la mort) et 17 films (dont L’amour est plus froid que la mort 1969, Lili Marleen, Tous les autres s’appellent Ali 1974, Despair 1978, Berlin Alexanderplatz 1980, Le Mariage de Maria Braun 1979, Querelle 1982) ; Hanna Schygulla est l’actrice fétiche de ses films, sa troupe rassemblait aussi Ingrid Caven, Peer Raben, et bien d’autres, le collectif vivait quasiment le théâtre 24h sur 24 ; « Il a l’énergie d’interroger avec l’intensité la plus aigüe chaque seconde de sa propre vie » dira le metteur en scène français Gwenaël Morin qui soulignera que « dans Gouttes dans l’océan il remplace le schéma éculé, le mari, la femme et l’amant, par un couple d’hommes… Se jouent entre les deux hommes des jeux de jalousie de colère, d’engueulades, d’exclusion »

1982 : en Afrique, découverte du 1er cas de contamination du VIH chez une femme

1982 : au Canada, parution de La duchesse et le roturier de Michel Tremblay, c’est le 3ème tome des « Chroniques du Plateau du Mont-Royal », sur la vie d’Edouard, vendeur de chaussures et travesti la nuit dans l’immédiat après-guerre, prise sur le vif avec son parler québécois ; l’auteur est de plus en plus connu et très prolixe, depuis les Contes des buveurs attardés paru en 1966 jusqu’à Un objet de beauté qui paraîtra en 1997, avec de nombreuses pièces de théâtre, traductions et adaptations, et des scénarios de films

1982 : au Canada, il sera mis à jour – en 2012, soit 30 ans plus tard – que de 1940 à 1982 le pensionnat de Montréal destiné aux jeunes sourds tenu par la congrégation des Clercs de Saint-Viateur, a laissé se développer l’un des plus grands scandales de pédophilie, 500 à 600 jeunes sourds de 8 à 17 ans ont été abusés physiquement ou sexuellement : « Des enfants battus à coup de batte de base-ball, poussés dans un escalier ou frappés en plein réfectoire pour avoir critiqué un plat » et « Les abus, sodomies, fellations, étaient banalisés, et le tabou tellement fort que personne n’en parlait » dira le directeur du Centre de la communauté sourde de Montréal, Gilles Read ; 34 pédophiles membres de la congrégation en grande majorité, et laïcs, seront identifiés ; le responsable des communications de la congrégation, le père Roger Brousseau, déclarera le 22 novembre 2012 « Nous condamnons tout acte pédophile. Si de tels gestes se sont produits, nous le regrettons »

1982 : aux USA, mort de Djuna Barnes (1892-1982), journaliste, reporter à Vanity Fair et The New Yorker, habituée des cercles bohèmes et lesbiens, elle fréquentait les salons de Mabel Dodge, égérie de l’avant-garde, elle a vécu 2 ans avec le rédacteur de presse  Courtenay Lemon, elle est devenue l’amie de Jane Heap et de Peggy Guggenheim, ; elle a fait paraître son Book of Repulsive Women en 1915, un des premiers ouvrages qui évoque le lesbianisme ; attirée par la liberté des mœurs et de la vie culturelle de Paris, elle s’y est installée en 1920 retrouvant la communauté d’Américaines, Natalie Barney, Gertrude Stein, Janet Flanner, Berenice Abbott, Sylvia Beach, Romaine Broooks ; elle a publié le Ladies Almanach – sans le signer – qui est diffusé à Paris sous le manteau, satire pleine d’humour du monde parisien cosmopolite et lesbien ; en 1927 elle s’est éprise de Thelma Wood, partageant sa vie jusqu’en 1931 ; elle fait paraître Ryder, roman illustré de ses dessins osés, puis Nightwood grâce à T.S. Eliot (qui ampute le manuscrit des 2/3) ; la guerre l’a contrainte à regagner New York en 1939 et sa chambre de Greenwich Village, où son amie Peggy Guggenheim lui a procuré une pension mensuelle et l’a accueillie dans la nouvelle galerie qu’elle a ouverte en 1944 (mais n’a pas vendu de toile, la mode ayant changé) ; en 1958 elle a terminé son œuvre majeure Antiphon (forme moderne de l’Orestie) qui sera mise en scène en 1990 à la Comédie Française par Daniel Mesguich

1982 : à Aix-en-Provence, fermeture de l’Eventail, les fonds manquent pour agrandir le local (projet de salle de 40m² pour des soirées vidéo) ; Patrick Cardon part en coopération comme enseignant au Maroc, à Oujda, c’est le temps de sa plongée dans le désir du garçon maghrébin, il écrit quelques articles pour la presse gaie française (Gai-Pied 1983-1986, ou All Man en 1990) et continue à se délecter des trouvailles littéraires qui jalonnent l’écriture homosexuelle (George Sand, Oscar Wilde, EM Forster, Virginia Woolf, Francis Carco, Federico-Garcia Lorca, Juan Goytisolo, André Gide, Jean Orieux, Georges Lapassade), il rencontre des témoins des années 1950 (Abdelkader qui se maquillait à la lueur de la bougie en 1953, s’habillait en femme et dansait avec le cirque Amar, ou dans un cabaret d’hommes, Chez Michel, à Tanger ou le Hassan à Rabat), et des années 1960 (Tani l’amie de celui qui, né à Tlemcen, n’est pas encore opérée par le médecin belge Blin et qui deviendra Coccinelle) ; il détecte les codes sexuels, la règle du bergaga partagé par les louats (les niqueurs, les actifs), le loubia (le nom du haricot pour l’efféminé) évite de se mêler aux louats car le danger est de passer pour le zammel (pédé) du quartier, de ce fait les loubias préfèrent chasser et séduire un client (quelqu’un qui peut payer, qui travaille et qui est plus âgé), l’insulte assida vise une jeune fille maquillée non accompagnée d’un homme et tout garçon efféminé, et kahba désigne celui qui va avec les hommes pour le plaisir qui s’offre des relations sexuelles non rémunérées donc illicites en dehors du mariage et pratique la débauche (la zinna), le berbère d’Agadir désignent le pédé comme hassass (sensible), l’arabe est plus réducteur avec zammel (enculé)

1982 : parution du n°1 de Féminin pluriel, revue lesbienne, directrice de publication Nathalie Lecuppre

1982 : depuis 1963, à la Réunion 1 600 enfants réunionnais ont été arrachés à leurs familles selon une politique lancée par le député de cette circonscription (à partir de 1963) Michel Debré, afin d’être adoptés par des familles de Creuse, l’exil et l’adoption se sont souvent doubles de maltraitance (harcèlement, frappe, esclavage)

2 janvier 1982 : le Matin de Paris titre « Les homosexuels punis par le cancer »

15 janvier 1982 : parution du n°1 d’Espaces, bulletin de liaison et d’information entre lesbiennes radicales

Février 1982 : autour de Willy Rozenbaum et Jacques Leibowitch se met en place un groupe d’alerte sur le sida, la « communauté homosexuelle » est immédiatement informée

13 février 1982 : en Algérie, adoption de la loi contre l’homosexualité, art. 333 du Code Pénal : l’outrage public à la pudeur est punie d’un emprisonnement de 2 mois à 2 ans et d’une amende de 500 à 2 000 dinars, et s’il est commis avec un individu de même sexe de 6 mois à 3 ans et de 1 000 à 10 000 dinars ; la loi sanctionne aussi toute distribution d’objet contraire à la décence (333 bis) ; et tout coupable d’un acte d’homosexualité est puni d’emprisonnement (2 mois à 2 ans) et d’amende (500 à 2 000 dinars) (338)

17 février 1982 : à Paris, au Palace les éditions Persona organisent un cocktail avec Conrad Detrez et le desinateur Luis Caballero pour la sortie du Mâle apôtre

24 février 1982 : réalisation de la 1ère fécondation in vitro, naissance d’Amandine, à l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart, par les Pr Jacques Testart et René Frydman

Mars 1982 : les Lesbiennes radicales et offensives proclament par affiche, dans Paris, la « Mobilisation générale contre tous les hommes. Ils agressnt, humilient, violent, tuent les femmes, tous les jours ; ils n’appellent pas ça la guerre. Nous si. Et nous sommes prêtes à la muner jusqu’au bout » suivent une dizaine de textes qui illustrent ces violences et ces agressions, ainsi que la mention Etat d’urgence

Mars 1982 : à Paris, à la Maison des femmes, Françoise Renaud, cofondatrice du MIEL proteste car le créneau des réunions du MIEL est occupé par l’AG de préparation de la Journée internationale des femmes, ainsi « la parole d’un groupe de lesbiennes, le plus important en nombre de présents, n’a aucun poids face aux vieilles traditions d’occultation de la parole lesbienne » (et dans Homophonies, celle-ci raconte cet événement) ; peu après lors de l’élection de la 2ème permanente, les membres du collectif de gestion évoquent leur réticence à désigner une 2ème lesbienne après qu’ils aient découvert que la première était une lesbienne, pour elles ce ne serait pas « représentatif » de ce que doit être la Maison des femmes

Mars 1982 : à Marseille, le 2° numéro de Le Bruys qui court, feuille mensuelle d’information de la Boulangerie Gay (du GLH qui a le nom officiel de CORPS), annonce les activités du mois, débat sur le couple homo, soirée couscous, exposé de Jacques Fortin sur « où en sont les homosexuels ? », soirée sur « notre écriture », exposition sur les poètes homosexuels d’hier et d’ajourd’hui ; la conférence de l’ILGA à Strasbourg s’annonce pour le week-end de Pâques ; il y a 50 adhérentys au GLH, Michel et Kaïd animent l’émission Come Out du vendredi sur Radio 13, la Boulangerie Gay devient le siège social du CUARH, un débat est annoncé pour le 29 avril avec le CORPS, Gai Pied, Masques et Jacques Girard, et l’AG mensuelle  du CORPS est annoncée pour le 5 avril ; la Boulangerie Gay est ouverte tous les jours à 18h30 sauf le lundi, jusqu’à 22h30

Mars 1982 : à Montréal, parution du n° 0 de Amazones d’hier lesbiennes d’aujourd’hui, revue d’échange, d’information et de réflexion politique, avec une place donnée au lesbianisme radical, le collectif fondateur est : Ginette Bergeron , Ariane Brunet, Danielle Charest et Louise Turcotte

8 mars 1982 : la ministre des Droits de la femme (1981-1986) Yvette Roudy relance solennellement la journée du 8 mars, journée de la Femme créée par Clara Zetkin en 1910 à Copenhague

Avril 1982 : le Gai Pied change de format, plusieurs pages en couleur, nouvelles rubriques (informations internationales etr culturelles), il y a désormais 14 permanents auprès du rédacteur en chef, Jean Le Bitoux, ainsi qu’une quinzaine de rédacteurs occasionnels, les salaires sont bas ; il tire à 45 000 exemplaires, et 20 000 à 25 000 exemplaires sont diffusé en Suisse et en Belgique ; la publicité assure 50% des recettes ; plusieurs écrivains Tony Duvert, Guy Hocquenghem, Dominique Fernandez et Yves Navarre y tiennent une chronique régulière

10 avril 1982 : à Strasbourg, réunion de l’International Gay Association dans un grand hôtel trouvé en urgence compte tenu des déclarations hostiles de l’évêque, alors qu’un local appartenant au diocèse avait été retenu et de l’attitude peu compréhensive de la ville

24 et 25 avril 1982 : séminaire de formation de l’Association des Médecins Gais ; une séquence du colloque est consacrée au sarcome de Kaposi

24 avril 1982 : à Paris, manifestation nationale avec pour mot d’ordre « Homosexualité, ni juge ni psychiatre ! », le collectif d’organisation considère qu’en cas de divorce pour cause d’homosexualité « sous prétexte d’intérêt de l’enfant c’est l’homosexualité qui est mise en procès »

24 avril 1982 : à Lyon, manifestation homosexuel-le l’ARIS et le GILH ont chacun leur banderole (pour le 2ème, elle affiche GILH. Pédés lesbiennes exigeons nos droits Lyon)

Mai 1982 : à Bruxelles, parution du n°1 de la revue de presse du Centre de documentation et de recherches sur  le lesbianisme radical, les Lesbianaires

6 mai 1982 : en Grande Bretagne, la revue médicale scientifique The Lancet publie un article sur la nouvelle maladie, avec les premiers cas africains

13 mai 1982 : lors d’une assemblée générale – théorique, compte tenu qu’il est le seul actionnaire – de la Sté CLESPALA (Club littéraire et scientifique des pays latins) André Baudry annonce la dissolution du club Arcadie et de la revue : « O tous et toutes, soyez heureux par l’exigence d’une vie homophile faite de courage et de dignité » ; à l’échéance du bail des locaux d’Arcadie, Baudry saisit l’occasion pour dissoudre l’organisation : « A moins d’un miracle, écrit-il dans une lettre aux adhérents-lecteurs le 15 mai, le 30 juin 1982, le 61 rue du Château-d’Eau fermera ses portes » (locaux de la société, le club créé en 1957 – logé jusqu’en 1969 dans l’appartement de 4 pièces derrière la place de la République, 19 rue Béranger – soit 3 ans après la création de la revue Arcadie) « club privé visant à permettre à tous nos amis de se connaître dans une ambiance de sécurité, d’amitié, pour le grand bien de tous », il évoque une forte hausse du loyer (le local sera transformé en magasion de vêtements…) ; Baudry publie alors dans La Condition homosexuelle : « Trop téméraires et trop sûrs ceux qui croiraient que dans un monde un peu en perdition, offrant à qui veut : désordre, immoralité, frivolité, bassesse, sexe et rien que sexe, les jeunes de 1982 ne vont que vers le facile et l’éphémère. Beaucoup de jeunes homophiles ont un grand et pur idéal et leurs conditions de vie se heurte parfois douloureusement et péniblement à ce fatras nauséabond qui leur est offert par certains douteux illustrateurs de l’homosexualité » ; dans son mot du mois lors de la dissolution d’Arcadie il fustige les homosexuels qui draguent au Jardin des Tuileries, dans les urinoirs, les bains publics, les cinémas ; dans sa lettre du 15 mai 1982, il considère que : « Les buts que (les fondateurs) s’étaient ficés… ont été globalement tenus. » il ajoute, en forme de reproche, que « Ceux de Paris, parmi vous qui lisez cette lettre n’ont RIEN fait pour (préserver) les activités dites culturelles » de la société

19 mai 1982 : le journal du CUARH, Homophonies, présente la photo d’un phallus qui est considéré comme une agression par les lesbiennes du MIEL, et provoque un débat utile sur la mixité

22 mai 1982 : en Suisse, la Goudou Manif de Genève est la 1ère où les lesbiennes manifestent seules, en non mixité, organisée par différents collectifs, le FLHO (Frauen lesbich oder Homosexuellen) de Zurich, le groupe Vanille Fraise de Genève, les Brigades Roses de Neuchâtel et des lesbiennes de Bâle, Fribourg et Berne, sous la bannière « Hors la nuit des normes, hors l’énorme ennui », la manif est suivie d’un bal au Centre de loisirs du quartier de la Jonction

Juin 1982 : au Canada, parution à Montréal du n°1 de la revue trimestielle Amazones d’hier et d’aujourd’hui, pour lesbiennes seulement « revue d’échange, d’information et de réflexion politique avec une emphase sur le lesbianisme radical » (2$50)

10 juin 1982 : mort de Rainer Werner Fassbinder (1945-1982), 37 ans, à Munich, en plein montage du film Querelle, tiré du roman Querelle de Brest de Jean Genet dont il s’est inspiré pour plaquer ses fantasmes ; il est né le 31 mai 1945 en Bavière, sa filmographie est impressionante : This Night (1966), L’Amour est plus froid que la mort et Le Bouc (1969), il se marie avec Ingrid Caven en 1970 dont il divorce 2 ans plus tard, Whity (1971), Les Larmes amères de Petra von Kant (1972), Tous les autres s’appellent Ali (1974), Le Droit du plus fort (1975), L’Allemagne en automne et Desespoir (1978), Le Mariage de Maria Braun et La Troisième Génération (1979), Lili Marleen et Lola, une femme allemnde (1981), Le Secret de Veronika Voss et Querelle (1982) ; bisexuel et militant homosexuel dans la vie comme dans ses films, il a fait tourner ses amants successifs (Gunther Kauffmann, El Hedi ben Salem, Armin Meier) ; Harry Baer a vécu 14 ans dans l’intimité de Fassbinder, il se souvient qu’on parlait davantage du cocaïnomane, de l’homosexuel, du grossier que du cinéaste : « Il était trop grand pour ce pays », il avait une boulimie de travail, il voulait défier l’apathie de l’Allemagne d’après-guerre ; Juliane Lorenz l’épouse de Fassbinder, qui l’a rencontré en 1979, entretiendra sa mémoire à travers la fondation Fassbinder ; Anna Schygulla dira : « Je l’ai toujours trouvé séduisant et dangereux… Il y avait beaucoup de sado-masochisme dans ses relations avec les autres » ; Volker Schlöndorff  dira qu’il était le « moteur du nouveau cinéma allemand » et Wim Wenders : « Beaucoup de choses ont changé. Il avait une volonté incroyable de prendre des risques. »

11-12 juin 1982 : à Aix-en-Provence, l’Eventail, animé par Patrick Cardon, propose avec la MJC Bellegarde deux journées de litterature et cinéma, autour de Pier Paolo Pasolini, à la MJC mais aussi au cinéma Alembic et au Palais des Congrès, une table ronde permet de rassembler une dizaine d’écrivains

19 juin 1982 : à Paris, « Marche nationale des homsexuels et des lesbiennes » c’est le contenu de la banderole de tête, marche appelée par le CUARH qui réunit 10 000 participants ; un cortège non-mixte réservé aux lesbiennes est organisé en tête de la marche

22 juin 1982 : loi supprimant l’obligation pour un locataire d’occuper son habitation « en bon père de famille » (loi Quillot)

Juillet 1982 : le journal Gai Pied s’inquiète de l’arrivée du sida, en page 3 du n° 40 on parle du cancer gay illustré par la photo d’un homme miné « Marc 28 ans apprend brutalement qu’il a le cancer gai »; Jacky Fougeray dira : « Gai Pied n’a pas eu peur de parler du sida dès le début. Mais on ne mesurait pas son ampleur. On ne voulait pas sombrer dans le catastrophisme : on continuait alors de battre nos records de vente » ; Jacky Fougeray se lancera bientôt dans la création du mensuel Samouraï

Juillet 1982 : Arcadie n’est pas là pour assister à l’avènement de l’abolition ce la dépénalisation, Baudry qui avait obtenu la reconnaissance officielle qu’il avait toujours souhaité, a refusé de prendre position pour François Mitterrand lors de l’élection présidentielle de 1981, il prend prétexte de la dissolution de la SARL Clepsala et de la revue en mai 1982 et de l’échéance du bail du local du Club en juillet, pour se taire ; il adresse un dernier message : « Loin du tumulte de ce peuple aimé en chacun et en chzacune de ceux qui sont venus vers moi, j’attendrai la mort »; André Baudry interrogé un mois plus tard par le journal Gai Pied (n°38) sur ce qu’il pense des homosexuels contemporains aux USA répondra : « Ils me font vomir« , puis demeurera silencieux, se réfugiant près de Naples, avec son ami fidèle

Juillet 1982 : à Marcevol, 2èmes rencontres des lesbiennes féministes

24 juillet 1982 : mort le la photographe et peintre suisse Florence Henri (1893-1982), elle a créé son propre studio photo en 1928, réalisant des portraits de femmes modernes, garçonnes, artistes, lesbiennes, avec des jeux de miroirs, donnant à ses modèles un caractère unisexe ; à partir de 1930 elle a collaboré à plusieurs revues, fréquentant Mondrian, Man Ray, Sophie Taueber-Arp et le groupe Cercle et Carré ; après la Seconde Guerre elle s’est tournée à nouveau vers la peinture

27 juillet 1982 : Gisèle Halimi, députée, et Robert Badinter, ministre de la justice, obtiennent, conformément à la promesse du candidat Mitterrand, la dépénalisation de l’homosexualité : abrogation de l’alinéa 2 de l’article 331 du Code pénal qui établissait une différence de majorité entre hétéros et homosexuels, désormais la majorité sexuelle est de 15 ans pour tous

4 août 1982 : loi n° 82-683 de dépénalisation de l’homosexualité – à la date anniversaire de l’abolition des privilèges de 1789 de l’aristocratie et du clergé – abrogation de l’alinéa 2 de l’article 331 du code pénal pénalisant les relations homosexuelles avec des mineurs de plus de 15 ans ; le Sénat refuse de voter le texte, Etienne Dailly rapporteur du texte déclare que la loi « laisse à penser à l’ensemble du pays que la pratique homosexuelle est devenue normale » ; le député gaulliste de l’Aveyron Jacques Godfrain pose une question écrite demandant au Gouvernement s’il ne lui semble pas nécessaire de lancer une campagne de publicité pour informer ma jeunesse des dangers de l’homosexualité ; Robert Badinter déclare : « L’Assemblée sait quel type de société, toujours marquée par l’arbitraire, l’intolérance, le fanatisme ou le racisme, a constamment pratiqué la chasse à l’homosexualité. Cette discrimination et cette répression sont incompatibles avec les principes d’un grand pays de liberté comme le nôtre. Il n’est que temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels, comme à tous ses autres citoyens dans tant d’autres domaines. La discrimination, la flétrissure qu’implique à leur égard l’existence d’une infraction particulière d’homosexualité les atteint – nous atteint tous – à travers une loi qui exprime l’idéologie, la pesanteur d’une époque odieuse de notre histoire. » ; Guy Hocqueng­hem écrit : « Homosexuels, vous avez changé de patron » ; loi d’amnistie incluant les délits homosexuels (4 août) ; circulaire Badinter aux parquets (27 août) ; Robert Badinter expliquera (Le Monde du 22 janvier 2022) le long parcours de sensibilisation du candidat François Mitterrand dès 1975, puis de combat pour faire voter cette loi d’abolition auprès du premier ministre Pierre Mauroy, à l’Assemblée nationale en s’appuyant sur le président de la commission des lois Raymond Forni, et au Sénat, face à Jean Foyer d’un côté, face à Etienne Dailly de l’autre, les ministres Gaston Defferre et Edmond Hervé feront leur part pour faire appliquer rapidemlent la nouvelle loi, le ministre de l’Intérieur en stoppant le fichage des homosexuels, le ministre de la Santé en refusant que l’OMS classe l’homosexualité parmi les maladies mentales ; Didier Varrod, jeune journaliste à Fréquence gaie, appelé par Patricia Charnelet d’Antenne 2, se retrouve, veste jaune et cheveux ébouriffées sur le plateau de TV « C’est à ce moment-là que tous les gens que je connaissais ont découvert que j’étais gay »

22 août-5 septembre 1982 : en Italie, le 4ème camping gay international se déroule près de Foggia, sur le sud du littotal adriatique, organisé par le mensuel gay Lambda, sur le village camping de Long Beach, en collaboration avec l’ARCI et la coopérative de spectacle de Bari, des centaines de gay européens s’y retrouvent dans une ambiance festive ; depuis 4 ans, ces camps sont des occasions uniques de vacances, de détente, de rencontres et de communications entre les gays et les personnes trans de différents pays ; le premier camping gay – extravagant et merveilleux  en un temps de non visibilité totale – s’était tenu à Capo Rizzuto dans l’extrême sud du « talon » de l’Italie, près de Crotone, en 1979

23 août 1982 : mort d’Alberto de Almeida Cavalcanti (1897-1982), producteur de cinéma, d’origine brésilienne, de L’Inhumaine de Marcel l’Herbier, et réalisateur de Rien que les heures et Le Train sans yeux en 1926, d’un documentaire sur les mineurs britanniques Coal Face (texte de WH Auden et musique de Benjalin Britten), il a réalisé 60 films jusqu’en 1967

28 août-5septembre 1982 : aux USA, les Gay Games de San Francisco accueillent 8 000 spectateurs  dans le Keazar Stadium pour l’ouverture de la 1ère édition des jeux le 28 août, devant 1 300 athlètes des deux sexes, représentant de 15 pays, dans 17 disciplines différentes ; la torche olympique est partie le 13 juin du Stonewall Inn à New York, elle arrive portée par deux compétiteurs des JO, George Frenn et Susan Mc Greivy, en présence de Doris Ward, adjointe au maire de San Francisco et du député républicain Phil Burton, Tina Turner qui anime le show de la soirée ; ils sont organiosés par Tom Waddell, capiutaine de l’équipe américaine de décathlon au JO de Mexico en 1968 ; le 9 août un tribunal saisi par le Comité Olympique US a refusé que l’événement utilise le qualificatif « olympique » ; 10 000 personnes sont présentes lors de la cérémonie de cloture ; le seul français participant, Frédéric Baumann, ramène la médaille d’or pour les 100 mètres et la médaille de bronze pour le pods masculin

Automne 1982 : parution du n°1 de CRIF (Centre de recherches, de réflexions et d’information féministes) ; parution de Chroniques aigües et graves, bimensuel de Diabol’amantes, collectif de lesbiennes radicales

Septembre 1982 : parution du n° zéro du magazine Lesbia qui compte 10 abonnées, ce n°0 gratuit ronéoté de 5 pages, est diffusé lors de la fête organisée par Gai Pied Hebdo au Cirque d’Hiver, les premières rédactrices (Nathalie, Chantal, Nicole, Patou et Michèle Rode) lancent un appel « prenez vos plumes et écrivez-nous »; Christine Jouve et Catherine Marjollet les rejoindront, une structure associative lancera le journal

3-5 septembre 1982 : en Grande-Bretagne, la conférence de l’ILIS se tient à Sheffield ; le MIEL y dresse un panorama sombre des lieux lesbiens parisiens et envisage la création ce groupes de musique de femmes pour les fêtes à la Maison des femmes pour que celle-ci arrête de reproduire l’armosphère de drague de boites de nuit

18 septembre 1982 : rassemblement Tour Saint-Jacques en soutien à Marie-Andrée Marion pour le procès des violeurs acquittés aux assises de Créteil ; le 25 septembre création du Comité international de dénonciation politique du viol et de soutien à Marie-Andrée Marion par des Lesbiennes radicales, sit-in devant le Palais de justice et barrage de la rue de Rivoli

Octobre 1982 : s’appuyant sur les articles 8 (droit au respect de la vie privée) et 14 (non-discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour européenne des droits de l’Homme condamne la législation de l’Irlande du Nord britannique incriminant les actes homosexuels entre adultes consentants (arrêt John)

Octobre 1982 : à Fréquence Gaie dont Geneviève Pastre est présidente, Jean-Luc Roméro devient l’un des animateurs, il y rencontre Didier Varrod, Alex Taylor, Bertrand Mosca ou encore Lorrain de Saint-Affrique, il y reçoit Jean-Paul Aron, Line Renaud, le Pasteur Doucé, Bertrand Delanoë ou encore Roger Karoutchi

Octobre 1982 : parution de Douze ans de « Femmes au quotidien » 1970-1981, 12 ans de luttes féministes en France, publié par la Griffonne, en supplément à l’Agenda-Femmes 1982

Octobre 1982 : dans la revue Lire, Pierre Sipriot rédige un article sur Une aventure secrète de Montherlant, il cite les lignes que les villes méditerranéennes de Marseille, Barcelone, Alger et Naples inspirent à ce grand viveurs, avec une citation latine sur les mœurs marseillaises efféminés et ses pleins délices, pour Montherlant c’est à Marseille que le libertinage des « filles » (dans son langage codé) est le plus poussé (dans sa correspondance avec Roger Peyrefitte, Montherlant narre ses rencontres avec les garçons de la ville pendant la guerre en 1940)

Octobre 1982 : le journal du CUARH, Homophonies donne la pariole à Marie Bonheur de la troupe de théâtre aixoise Les Mirabelles, aux 4 Mirabelles (Marie-Bonheur, Loulou Bonheur, La Limande Germaine et Nini Crépon) se sont adjoints, depuis le départ de Nini, Charles Berling et Michelle Godet, Fabrice Boulanger est au piano ; les 4 amis se sont regroupés en 1974 pour faire un petit spectacle au cinéma Le 16/35, ils sont rentrés sur scène en talons aiguilles chantant Je ne suis pas une fille, « ce fut du délire pendant 3/4 d’heure » ; puis ils ont monté Fauves, Les Berceuses d’orages,  puis le déprt de Nini Crépon les a beacoup affectés, Les Guérilléroses, les Contes de la dame blanche, Blanchisserie blanche joués au studio des Champs Elysées à Paris, en province et au Festival d’Avignon, enfin Passage hagard à la salle des fêtes de Champ-fleuri à Avignon et maintenant au Dejazet à Paris, qui se déroule dans un port, avec Isis, le trapéziste superbe Scarlette et son amant Rudolphe, Mlle Dieu, mme Irène Goujon-Bassard tenancière de la boite Le Sarcophage ; « les créations sont toujours complètement collectives » ajoute Marie-Bonheur

9-10 octobre 1982 : à Paris, réunion de la commission nationale du CUARH, en présence de Michel (GAISS, le Mans), Jean Boyer-Cavaillès (GLH et DH, Dijon), Arthur, Jean Rossignol (Gai PTT, Paris), Catherine Gonnard (D’Dassistance Gaie Paris) , Hervé Liffran et Jan-Paul Pouliquen (COPARH, Paris), Laurent Doumerc (CLARH, Lille), Gérard Maison (Partages, Paris), Pierre Dutey (GILH, Lyon) rédacteur du PV, Aline (MIEL, Paris), Jean-Henri (Phare, Toulouse), Gérard Bach (CHOP et GRED, Paris), Jean-Michel (Etre et connaître, Rouen) ; à l’ordre du jour:  1 500 pétitions et dépliants tirés, contacts média, contacts parlementaires pour faire voter la loi de dépénalisation, protestation auprès de la RATP qui refuse à Gai Pied un espace publicitaire, point financier concernant Homophonies (le journal du CUARH) et appel à subvention envisagé, fête au Palace prévue le 5 décembre 1982, coordination nationale prévue le 15 janvier 1983, discussion sur le contenu du prochain n° d’Homophonies (dossier mensuel de 4 à 6 pages les thèmes prévus sont Lieux associatifs, Education, Homosexualités au travail et Famille, en outre revue de presse, petites annonces et biographie d’Yves Navarre), désignation de responsables de rubriques, les recettes publicitaires sont autour de 10 000 francs mensuel, les cotisations au CUARH sont fixées à 2 francs par mois et par adhérent (et s’il y a un groupe et un lieu associatif  dans une ville, les doubles mandats sont soumis à double cotisation), pour assurer les urgences de la commission nationale un secrétariat rotatif est mis en place (6 personnes, 1/3 de parisiens), affaire des Balcons de Rouen opposant l’association Etre et connaitre à un directeur d’agence bancaire qui ne supporte pas qu’elle se réunisse au dessus (il demande le retrait des plaintes et propose une transaction), pétition pour Marie-André Marion (suite à un avortement), pression sur Amnesty international qui refuse d’assimiler les homosexuels emprisonnés à des prisonniers d’opinion, information sur la rencontre Gai PTT/ministère des PTT qui a abouti à la reconnaissance de Gai PTT comme association interne (avec accès au foyers-logements pour les couples gay et intervention pour l’abolition de l’article 16 de la fonction publique) ; prochaines commissions nationales (20 novembre et 18 décembre 1982)

13 octobre 1982 : l’affaire du Coral éclate, le lieu de vie pour enfants en difficultés est accusé de pédophilie

18 octobre 1982 : à Paris, fête de lesbiennes pour le soutien à l’Intempestive, collectif pour l’organisation d’un réseau lesbien, 28 rue Dunois

6 novembre 1982 : à Paris, à la librairie Les Mots à la bouche, la revue Masques célèbre le prix Goncourt de Dominique Fernandez pour Dans la main de l’ange

24 décembre 1982 : mort du poète, romancier, journaliste Louis Aragon (1897-1982), directeur des Lettres françaises de 1953 à 1972